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Réutiliser les eaux usées traitées pour préserver la ressource, le pilote innovant de la Communauté d’Agglomération d’Épinal (88)

Maillage hydraulique, politique de lutte contre les fuites, gestion intégrée des eaux de pluie (GIEP), plan de sobriété hydrique, la Communauté d’Agglomération d’Épinal (88) a complètement repensé ses usages de l’eau.

Première collectivité vosgienne à expérimenter la réutilisation des eaux usées traitées (Reut), la CAE a lancé un projet pilote sur le site de la station d’épuration de Thaon-les-Vosges, qui traite entre 1700 et 7000 mètres cubes par jour. L’eau ainsi traitée sera utilisée par la ville de Thaon-les-Vosges à des fins d’arrosage pour les espaces verts pour des besoins estimés entre six et huit mètres cubes par jour. Ce pilote d’un coût de 50 000 € ouvre des perspectives à la collectivité qui dispose de 30 STEP et traite 10 millions de mètres cubes.

 

Entretien avec Frédéric Dulot et Céline Brégier

Parole de collectivité
Céline Brégier et Frédéric Dulot - Crédits photo : Banque des Territoires
Gestion quantitative de la ressource

Ce projet est présenté par :

  • Frédéric Dulot, vice-président de la communauté d’agglomération d’Épinal (CAE) et maire de Vaxoncourt.
  • Céline Brégier, directrice du service eau et assainissement de la CAE
Les eaux usées sont majoritairement rejetées dans les cours d'eau or ce sont un gisement potentiel de matières premières et une véritable alternative à l'eau douce prélevée dans le sous-sol.

Frédéric Dulot

Parole de collectivité

Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action

Comment le sujet s’est-il imposé à l’agenda de votre collectivité ?

Les compétences “eau et assainissement” ont été transférées à l’intercommunalité en 2019 pour l’assainissement et en 2020 pour l’eau potable. C’est à ce moment que nous avons commencé à repenser l’usage de l’eau.

Certaines communes avaient déjà des difficultés d’alimentation en eau l’été et étaient ravitaillées depuis quelques années lors de périodes de sécheresse par les communes voisines. Nous avons donc commencé par réfléchir au maillage hydraulique afin de garantir la quantité d’eau potable nécessaire sur l’ensemble des communes pour pallier l’inégalité de la répartition des sources. À cela s’ajoutent une politique forte de lutte contre les fuites avec l’installation de vannes de sectorisation sur les réseaux, la mise en place de télégestion sur les ouvrages et  la gestion intégrée des eaux pluviales (GIEP) pour favoriser l’infiltration sur place des eaux de pluie.

Lors de l’été 2022, un arrêté sécheresse a été pris par les services préfectoraux de manière très précoce dans la saison pour limiter les usages de l’eau et interdire notamment l’arrosage des espaces verts. Suite à cela, le maire de la commune de Thaon-les-Vosges a sollicité la Communauté d’Agglomération d’Epinal (CAE) pour envisager l’arrosage des espaces verts avec des eaux usées traitées de la STEP. Nous avons trouvé le sujet très intéressant, et à partir de là nous avons immédiatement entrepris des démarches pour nous assurer que ce projet était compatible avec la réglementation en vigueur et pour identifier les contraintes administratives, techniques et financières. Un dossier d’autorisation pour permettre réglementairement cette réutilisation a été déposé auprès de la DDT des Vosges, il a reçu un avis favorable du Coderst le 23 mai 2024 et devrait être signé très prochainement. Le dossier intègre également la réutilisation des eaux usées traitées pour le curage du réseau d’assainissement.

Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?

Utilisée dans le monde depuis 20 ans, cette pratique est en forte croissance depuis plus de 10 ans notamment dans les pays précurseurs tels que les États-Unis, l’Espagne ou encore l’Égypte. En France, la réutilisation des eaux usées (Reut) reste une solution sous-exploitée malgré la prise de conscience du changement climatique. En effet, seuls 0,02 million de mètres cubes par jour d’eaux usées sont réutilisés alors qu’en Espagne ce chiffre s’élève à plus de 3 millions. Ce faible engouement a plusieurs explications notamment une quantité d’eau disponible suffisante sur notre territoire pour le moment et une réglementation en la matière inexistante avant 2010.

Néanmoins au vu de l’augmentation des surfaces touchées par les sécheresses et de leur durée, cette pratique s’accélère. Aujourd’hui , 53 projets de Reut (majoritairement agricole dans 60 % des cas et urbaine dans 32 % des cas) sont en fonctionnement, surtout dans l’Ouest et le Sud de la France et 28 projets de Reut sont en cours de développement pour des usages principalement urbains.

Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?

Nous avons initié un projet pilote de Reut en sortie de station d’épuration de Thaon-les-Vosges. Il a permis dans un premier temps de tester les appareils et d’appréhender la qualité de l’eau traitée en réalisant des analyses. Les contraintes sont supérieures aux contraintes pour le rejet des eaux dans la Moselle. Tout est normé, nous ne pouvons pas prélever plus de 10 % du rejet des eaux usées afin d’éviter un impact négatif sur l’environnement en période d’étiage. Les eaux usées traitées doivent être utilisées dans les 72h, pas d’arrosage en plein vent, pas de pulvérisation, les usages sont très réglementés.

En parallèle, nous allons mener une étude de sécurisation, de structuration et de rationalisation de la production et de la distribution en eau potable sur l’ensemble du territoire. Dans le cadre de cette étude, les gros consommateurs seront identifiés et les usages de l’eau analysés. Cette analyse permettra d’identifier le potentiel d’usagers qui pourrait utiliser de l’eau usée traitée afin de dimensionner nos équipements futurs en fonction des besoins.

Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?

Il est essentiel d’appréhender et de savoir décrypter la réglementation en la matière. Celle-ci, inexistante avant 2010, est apparue progressivement. Le premier texte de référence à la Reut, datant du 2 août 2010, ne porte que sur l’irrigation de culture et d’espaces verts. C’est ce document qui précise plus particulièrement les conditions de réutilisation et en particulier le niveau de traitement à atteindre par l’installation.

Le décret du 10 mars 2022 ouvre l’utilisation des eaux usées traitées à d’autres applications que l’irrigation en interdisant quand même leurs utilisations dans certaines circonstances.  Puis l’arrêté du 28 juillet 2022 précise très clairement le contenu du dossier de déclaration qui doit être déposé pour obtenir une autorisation de Reut. Dans le cadre du plan eau, le décret du 29 août 2023 simplifie les démarches et procédures pour l’autorisation de ce type de projet.

Enfin le décret du 14 décembre 2023 précise les conditions de production et d’utilisation des eaux usées traitées pour l’arrosage des espaces verts.

Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?

Il s’agit d’un pilote, avant d’obtenir l’adhésion des citoyens, nous nous sommes penchés sur l’adhésion des utilisateurs à savoir les agents des services techniques de Thaon-les-Vosges. Ils ont reçu une formation spécifique pour les informer sur le sujet et leur transmettre les bonnes pratiques telles ne pas arroser par aspersion ni en cas de vent.

Notre stratégie est de développer une communication positive auprès des citoyens : nous allons réaliser des affiches de communication pour les informer de l’importance de préserver la ressource en eau et de l’usage de l’eau usée traitée. C’est un geste noble qui doit être valorisé.

Comment la CAE a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?

Ce premier pilote a été financé intégralement par la collectivité. Son coût est estimé à 50000 € au total (dossier plus équipement).

La CAE dispose d’un potentiel de 30 stations d’épuration qui traitent 10 millions de mètres cubes d’eaux usées par an. Les objectifs de déploiement portent principalement sur les 12 stations d’épuration à boues activées du territoire, notamment celles de Vincey, Golbey, Arches et la Vôge-les-Bains, principalement pour des usages d’arrosage et d’hydro curages des réseaux dans un premier temps. Toutefois, la réflexion sur le déploiement de la Reut est récente, l’analyse des besoins n’est pas encore finalisée et d’autres besoins ou usages peuvent être identifiés.

Ainsi, le déploiement des équipements nécessaires pour envisager la réutilisation des eaux usées traitées sur ces quatre stations de traitement des eaux usées est estimé à 364 011,25 € HT. Un dossier de subvention global est en cours de validation auprès de l’Agence de l’eau qui possède des crédits spécifiques aux projets innovants.

Quels sont les autres acteurs qui vous ont accompagné dans la préparation et la réalisation de ce projet ?

Suez, le délégataire de la station d’épuration de Thaon-les-Vosges, nous a beaucoup accompagnés dans ce projet et notamment dans le décryptage de la réglementation, ainsi que dans le montage du dossier réglementaire.

Je tiens à souligner l’engagement de la Préfecture dont les services ont également servi de catalyseur en réunissant tous les acteurs dont l’ARS et la DDT pour lever les craintes et faire émerger ce projet. Sans leur soutien rien n’aurait été possible.

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Le projet en détails

Dates clés

2022

Mise à l’agenda

2022 - 2023

Inspiration & Compétences

2022 - 2023

Diagnostic & Planification

2023

Réalisation

Chiffres clés

30

Nombre de stations de traitements des eaux usées

750

Kilomètres de réseaux de collecte

10 000 000

m3 d'eaux usées traitées

À retenir

L'exemplarité de la démarche

Le pilote est un vecteur de communication démonstratif qui incite les élus, les usagers, les partenaires et plus globalement tous les acteurs à repenser l'usage de l'eau potable. Il a impulsé une dynamique !

La réglementation très contraignante

Les partenaires de ce projet

No data was found

Les acteurs de la filière eau impliqués dans ce projet

Suez

Suez

En savoir plus sur la communauté d'agglomération d'Epinal

Nombre de communes rattachées

78

Nombre d'habitants

116000

Données de contact

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