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Sur la Loire (49), 9 producteurs d’eau potable ont organisé leur chaîne d’alerte aux pollutions

La Loire est l’une des principales sources d’alimentation pour la production d’eau potable en Indre-et-Loire, Maine-et-Loire et Loire-Atlantique. En février 2024, le signalement d’une nappe suspecte dans le fleuve a été l’occasion pour le Réseau Loire Alerte d’activer son plan de prévention en informant tous les producteurs d’eau potable du passage de la masse d’eau critique à hauteur de leurs captages.

Face à ce risque, Angers Loire Métropole avait basculé sa production d’eau potable à partir de sa réserve de secours, la fosse de Sorges aux Ponts-de-Cé. Retour sur cet incident, finalement sans gravité, et sur les défis nouveaux relevés par le Réseau Loire Alerte face à toutes les formes de pollution et aux enjeux de la quantité d’eau.

Entretien avec Jean-Paul Pavillon et Baptiste Prunier

Parole de collectivité
A gauche, Baptiste Prunier, pilote de projet à Angers Loire Métropole, est délégué pour 10 % de son temps à l’animation du Réseau Loire Alerte. A droite, Jean-Paul Pavillon, président du Réseau Loire Alerte, présente à la presse les conclusions de l’exerce d’alerte à la pollution réalisé en 2022 à Ancenis - Crédits photo : Réseau Loire Alerte
Pollutions

Ce projet est présenté par :

  • Jean-Paul Pavillon, président du Réseau Loire Alerte, vice-président d’Angers Loire Métropole en charge du cycle de l’eau
  • Baptiste Prunier, animateur du Réseau Loire Alerte, pilote de projets eau assainissement à Angers Loire Métropole
Le Réseau Loire Alerte n’est plus seulement un outil de surveillance de la Loire, mais devient un lieu pour mutualiser des actions dans une logique de solidarité amont-aval, par exemple la déclinaison du plan eau de l’État.
Jean-Paul Pavillon

Parole de collectivité

Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action

Comment la gestion du risque de pollution en Loire s’est-elle imposée à l’agenda de votre collectivité ?

Baptiste Prunier : Le dernier incident remonte à février 2024. Le Réseau Loire Alerte a reçu le signalement d’un rejet non identifié en Loire à hauteur d’Orléans, potentiellement une nappe d’hydrocarbures sur plusieurs kilomètres. La chaîne d’alerte a été activée pour informer les 9 producteurs d’eau potable en aval. Nous avons fait tourner le modèle hydraulique pour prédire la date d’arrivée de la masse d’eau polluée au droit des captages ainsi que sa durée de passage. En tant que producteur d’eau potable, Angers Loire Métropole a décidé de cesser le pompage en Loire – avec l’accord de l’agence régionale de santé (ARS) – pour basculer sur sa réserve d’eau brute. Même si l’alerte a été levée en quelques heures, nous avons maintenu la production à partir de la fosse de Sorges pendant toute la durée modélisée du passage de la masse d’eau critique, soit 40 heures. Cela nous permettait de faire en conditions quasi réelles notre exercice annuel de test de l’équipement de secours.

Jean-Paul Pavillon : Angers a été au centre de la création du Réseau Loire Alerte en 1998. 8 collectivités produisant de l’eau potable à partir de la Loire ou sa nappe alluviale, en Maine-et-Loire et en Loire-Atlantique, s’étaient regroupées sous forme de syndicat mixte. Historiquement, ce réseau a été pensé pour alerter sur une pollution ponctuelle, type nappe d’hydrocarbure. Aujourd’hui, avec les polluants diffus (PFAS, TFA, pesticides, microplastiques, tritium provenant des centrales nucléaires en amont…), la potabilité est questionnée en continu. De plus, depuis le très faible débit atteint en 2022, nous ne considérons plus la Loire comme une ressource inépuisable. Aujourd’hui, le Réseau Loire Alerte a donc vocation à mutualiser des actions sur plusieurs sujets de fond, sur la qualité comme la quantité, dans une perspective solidaire entre l’amont et l’aval.

Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?

Jean-Paul Pavillon : C’est l’ARS Pays de la Loire qui est à l’origine du Réseau Loire Alerte, entre Saumur et Saint-Nazaire. Elle reste son principal partenaire, par son rôle de contrôle sanitaire de l’eau. Une telle chaîne d’alerte peut paraître uniquement une affaire de technicien, mais l’eau est une préoccupation générale et donc politique. En intégrant Tours Métropole en 2023, qui est sur la région Centre Val de Loire, le Réseau Loire Alerte a commencé à remonter le fil de l’eau. C’est intéressant de créer un lien avec une collectivité d’une autre région, car si cela complexifie la gestion en ajoutant plusieurs acteurs, cela simplifie aussi les échanges. Il y aurait même un intérêt à remonter jusqu’à Orléans, comme le montre l’incident de 2024 dont nous aurions eu connaissance encore plus tôt si la collectivité avait fait partie du réseau. De tels rapprochements se passent à la fois dans les instances de gouvernance et sur le terrain. Je suis administrateur à l’Agence de l’eau Loire-Bretagne et à l’établissement public Loire. Quant aux techniciens, ils ont déjà des relations de travail, voire des parcours professionnels d’une collectivité à l’autre. Ces liens sont importants et inspirants.

Est-ce qu’une étude de faisabilité ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?

Baptiste Prunier : Mener des études pour mieux connaitre le fonctionnement du fleuve et sa qualité fait partie des objectifs du réseau. Par exemple, nous réaliserons en 2025 des campagnes de prélèvements coordonnées entre les exploitants de l’eau brute en période de crues ou d’étiage sur plusieurs paramètres : PFAS, TFA, pesticides, tritium). Il s’agit ensuite de modélisation, de tests et d’exercice pour anticiper la gestion de crise. Le Réseau Loire Alerte a eu pour première préoccupation de développer un modèle hydraulique prédisant la migration d’une pollution : son parcours, sa vitesse de propagation, sa durée. Notre modèle 1D anticipe les horaires de passage de la pollution pour chaque captage d’eau potable. En fonction du débit de la Loire, cela peut prendre plusieurs jours. Ainsi, la pollution suspectée à Orléans un jeudi devait arriver le samedi à hauteur du captage d’Angers. Pour les exploitants, c’est un outil d’aide à la décision indispensable. Nous vérifions la validité de ce modèle théorique régulièrement en simulant une pollution en Loire. En juin 2024, nous avons déversé du son de riz qui a la particularité de se comporter comme une nappe d’hydrocarbure. Ces tests en Loire nous permettent aussi de valider sur le terrain l’organisation de la gestion de crise avec tous les acteurs (ARS, SDIS, préfecture…). De plus, chaque année, nous testons la chaine de communication pour vérifier que les coordonnées sont à jour, que tous les acteurs reçoivent la bonne information au bon moment.

Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?

Jean-Paul Pavillon : C’est le Réseau Loire Alerte lui-même qui est devenu un lieu de montée en compétences et d’échanges pour les acteurs. Depuis 2023, nous organisons un colloque annuel sur des thématiques qui dépassent les enjeux de pollution. Par exemple, Nantes Métropole nous a présenté sa problématique de bouchon vaseux qui peut l’empêcher de pomper en Loire pendant plusieurs heures. Elle est aggravée par un débit faible du fleuve, ce qui signifie que les prélèvements que nous faisons en amont peuvent avoir un impact. Comprendre les problématiques des autres renforce la solidarité amont-aval. Pour poursuivre cette montée en compétences, nous avons intérêt à aller chercher d’autres partenaires experts sur chaque sujet plutôt que de réinventer. Par exemple, nous pouvons nous rapprocher de vigicrues sur la thématique inondations.

Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment avez-vous assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?

Jean-Paul Pavillon : Le réseau évolue et nous nous donnons les moyens d’une montée en puissance de l’animation et de la communication, en nous appuyant plus fortement sur les ressources humaines des syndicats membres. En 2022, nous avons mis en place une convention de mise à disposition du temps d’agents d’Angers Loire Métropole et de Nantes Métropole. Un site internet a été créé. Les simulations de pollution en Loire sont aussi un temps de communication pour faire connaître le réseau auprès du grand public.

Baptiste Prunier : 20 % de mon temps est consacré à l’animation du réseau, l’organisation des colloques, la gestion administrative et la communication. Concernant les citoyens, on observe une diminution de la consommation d’eau de 5 % à 10 % sur le territoire du Réseau Loire Alerte depuis 2022. C’est une année de prise de conscience des enjeux de l’eau.

Comment avez-vous financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?

Les membres du Réseau Loire alerte cotisent à hauteur de 0,50 euros par millier de m³ prélevé. Il n’y a pas d’autres financements.

Quels sont les autres acteurs qui accompagnent le Réseau Loire Alerte ?

Baptiste Prunier : L’ARS, les SDIS et les services de l’État sont nos principaux partenaires. Le réseau a confié à Veolia la mise en œuvre du réseau d’alerte et à DHI France le développement du modèle hydraulique. Veolia assure l’astreinte pour le déclenchement de la chaine d’alerte, se rend sur les lieux pour réaliser des prélèvements et définir l’origine, la nature et la gravité de la pollution, puis fait tourner le modèle prédictif si nécessaire. Chaque événement fait l’objet d’un rapport. Le réseau s’appuie aussi sur un réseau d’observateurs de la Loire, notamment les pêcheurs professionnels. Les pêcheurs sont agréés en tant que sentinelles, formés et équipés pour réaliser des prélèvements si une masse d’eau leur paraît suspecte.

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Le projet en détails

Dates clés

1998

Création du Réseau Loire Alerte avec 8 collectivités

2022

Renouvellement du contrat prestataire de la cellule d’alerte

2023

Premier colloque du Réseau Loire Alerte

Novembre 2023

Intégration de la 9ème collectivité

Chiffres clés

330

km de surveillance

166 000

euros, de budget annuel en 2022

1,6

millions d'habitants

À retenir

Le modèle hydraulique est un outil d’aide à la décision indispensable pour les producteurs d’eau potable en cas de crise sur la Loire

Fort de sa capacité à anticiper et gérer les situations de crise, le Réseau Loire Alerte monte en puissance pour porter une démarche collective globale de l’utilisation de la ressource

Il faut aller plus loin dans le partage de données entre exploitants de captages sur la Loire, ce qui est un défi technique important

Ressources

Environnement. Pourquoi une pollution a-t-elle été simulée dans la Loire

le Réseau Loire Alerte a rejeté un liquide fluorescent dans la Loire en Montsoreau et Saumur (Maine-et-Loire) pour simuler une pollution dans le fleuve

Les partenaires de ce projet

Les-agences-regionales-de-sante-ARS_

Agence régionale de santé

RS-Visuel-non-disponible-150x150

SDIS

veolia

Veolia

Les acteurs de la filière eau impliqués dans ce projet

DHI France

En savoir plus sur le Réseau Loire Alerte

collectivités membres

9

communes

350

Donnée de contact

L'eau sur mon territoire

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