Un chantier 2 en 1 pour améliorer l’assainissement et prévenir les inondations à Loos-en-Gohelle (62)
La gestion de l’eau est un sujet central pour la Communauté d’agglomération de Lens-Liévin (CALL – 62), qui conjugue investissements conséquents et sensibilisation de tous les habitants. En 2023, elle a achevé la restructuration du poste de refoulement de Loos-en-Gohelle. Un chantier de 6,1 M€ TTC, financé par la CALL, l’agence de l’eau Artois Picardie et l’Etat au titre de la DSIL (dotation de soutien à l’investissement local). Les travaux triplent la capacité de l’ouvrage, composé d’un bassin de stockage des eaux usées et d’un autre d’infiltration des eaux claires. Le dispositif améliore l’assainissement, réduit les risques d’inondation et préserve la ressource et la qualité de l’eau.
Entretien avec Pierre Sénéchal, vice-président en charge de l'Eau et de l'assainissement à la Communauté d'agglomération de Lens-Liévin
Le projet est porté par :
- Pierre Sénéchal est vice-président en charge de l’Eau et de l’assainissement à la Communauté d’agglomération de Lens-Liévin (62). La CALL regroupe 36 communes et 250 000 habitants.
Pierre Sénéchal
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment le sujet de la restructuration du poste de refoulement de Hoche s’est-il imposé à l’agenda de la CALL ?
La Communauté d’agglomération de Lens-Liévin (CALL) a fait de l’eau l’un de ses sujets majeurs. Nous sommes situés dans un secteur où l’eau est abondante et les champs captants nombreux. Le territoire est caractérisé par la présence d’entreprises grandes consommatrices d’eau. Nous avons par ailleurs un sous-sol est très instable hérité du passé minier, qui nécessite contrôles et réparations fréquentes.
Même si nous ne manquons pas d’eau, nous sommes convaincus que la protection et la bonne gestion de ce bien commun se prépare dès à présent. L’idée n’est pas d’attendre la raréfaction de la ressource pour agir, mais d’anticiper. Nous avons d’ailleurs co-organisé en mars 2023 le neuvième Forum national de la gestion durable des eaux pluviales avec l’Agence de l’eau Artois-Picardie et l’association ADOPTA.
Nous avons donc une politique d’investissement très ambitieuse sur le sujet eau. Outre le projet du poste de refoulement Hoche, nous avons consacré 12 millions d’euros à la construction de deux châteaux d’eau à Lens et Bully-les-Mines (livrés en 2019).
A Loos-en-Gohelle, le poste de refoulement Hoche recueille les eaux usées des habitants de la commune ainsi que les eaux de pluie, avant de les renvoyer vers la station d’épuration de Loison-sous-Lens, où elles sont traitées. Le poste de refoulement était vétuste et sa capacité de 3 700m3 était dépassée lors des gros orages. Il y avait également des pollutions liées à l’infiltration d’eaux usées dans la nappe phréatique. Par ailleurs, c’était un bassin à ciel ouvert, certes situé en retrait des habitations, mais causant néanmoins des nuisances olfactives.
Nous avons pensé le chantier de rénovation avec la perspective globale qui est toujours la nôtre : en l’occurrence gérer les eaux usées, mais aussi réduire les risques d’inondations et préserver la ressource et la qualité de l’eau. Il a été achevé mi 2023.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
La CALL a développé au fil des ans une véritable expertise sur les projets « eau ». La plupart de nos opérations sont d’ailleurs menées en maîtrise d’œuvre interne. D’où une grande réactivité et un contrôle efficace de l’exécution des travaux. Cette expérience et cette maîtrise nous a d’ailleurs permis d’être parmi les premiers à monter le dossier du Plan de relance. Pour cette opération, qui nécessite une technicité particulière, nous avons fait appel à un groupement de maitrise d’œuvre.
Nous allons régulièrement voir ce qui se fait ailleurs, en France comme à l’étranger. Il faut souligner d’ailleurs la qualité du modèle français de la gestion de l’eau. Nous avons des opérateurs d’envergure nationale, beaucoup de recherche et développement, des entreprises qui proposent des solutions innovantes.
En appui à notre maîtrise d’œuvre, nous nous sommes adjoint les services de deux bureaux d’études reconnus. Le projet triple notre capacité de stockage, qui passe de 3 700m3 à 13 200m3 et permet de séparer eaux usées et eaux de pluie. Il se caractérise par la construction de deux bassins. Le premier est enterré à 15m de profondeur. D’un diamètre de 27m et d’une capacité de 7 100m3, il stocke les eaux usées et les eaux industrielles avant de les renvoyer par pompage vers la station d’épuration. Le fond est constitué de béton injecté et équipé d’un système de nettoyage automatique. Les parois sont moulées, une technique complexe et exceptionnelle pour un bassin enterré. Cette technique permet de s’affranchir des contraintes liées aux remontées de nappe et a nécessité un fin calage de calendrier.
Le second bassin est un bassin d’infiltration. D’une capacité de 6 100m3, il recueille les eaux pluviales qui sont filtrées par une végétation adaptée avant de repartir dans le sol. Il sera tout particulièrement précieux pour protéger la nappe phréatique et réduire les risques d’inondations lors des épisodes de fortes pluies. En effet, l’étanchéification de ces bassins permet d’éviter les transferts d’eaux usées vers les nappes.
Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée ?
Il aura fallu deux ans d’études pour finaliser le projet. Elles ont surtout porté sur l’aspect géotechnique car notre sous-sol recèle bien des surprises. Il est instable dans les anciens secteurs miniers. Et à d’autres endroits, on retrouve encore d’ancien obus de la Première guerre mondiale. Il a fallu comprendre le fonctionnement des sols…
Le projet a été présenté aux services de l’Etat et notamment à la DDTM en septembre 2018. Cela nous a permis d’identifier les autorisations réglementaires nécessaires, notamment au regard de la Loi sur l’eau. En 2019, nous avons mené l’étude faune flore et nommé un hydrologue pour vérifier la comptabilité du projet avec nos ressources en eau. Nous avons obtenu l’avis favorable de la commune de Loos-en-Gohelle en 2019 et celle des services de l’Etat début 2020. Les consultations d’entreprises ont été lancées en 2020 pour des travaux menés entre février 2021 et mai 2023.
Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce type de projet ?
L’urbanisme, la réglementation, le dimensionnement hydraulique, la conduite d’opérations et la programmation technique.
Lors des phases de diagnostic et de planification, comment la CALL a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
Comme nos ancêtres mineurs, nous faisons des travaux souterrains… Ils ne se voient pas et sont coûteux mais néanmoins indispensables. Il faut le faire comprendre… Nous avons organisé une réunion publique à Loos-en-Gohelle au lancement du projet et fait beaucoup d’information dans les supports de communication de la CALL.
Ce projet sur le poste de refoulement Hoche s’inscrit dans une campagne de communication au long cours. Nous avons pris le parti de travailler beaucoup avec les enfants des écoles. Une récente journée consacrée au petit et au grand cycle de l’eau a ainsi accueilli plus de 800 élèves. Durant l’été 2023, nous allons aussi offrir un récupérateur d’eau de pluie à chaque foyer de la CALL qui en fera la demande. Notre objectif est de sensibiliser les habitants à la gestion raisonnée de l’eau, sans le discours catastrophiste qui souvent paralyse l’action. Cette bonne gestion, c’est comme un puzzle géant auquel chacun, habitant, enfant, entreprise, collectivité, doit apporter sa pièce.
Comment la communauté d’agglomération a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?
Le coût du projet est de 5,05 millions d’euros HT, soit 6 ,06 millions TTC. Il a été financé par :
- l’Agence de l’Eau Artois-Picardie, à hauteur de 1 746 600 euros HT
- L’Etat, via le Plan de relance et plus spécifiquement la DSIL (Dotation de soutien à l’investissement local), à hauteur de 495 720 euros HT
- la CALL, qui s’est engagée à ne pas répercuter le coût de ce chantier sur la facture d’eau des usagers. 2 807 966 euros HT
Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné la CALL dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
Notre projet répondant à plusieurs enjeux distincts, l’Agence de l’Eau Artois-Picardie nous a aidés à identifier et à mobiliser les aides possibles.
Nous avons été accompagnés par les bureaux d’études Elcimaï (pour la partie études) et SB Conseils (pour la partie travaux)
Les travaux ont été confiés à un groupement d’entreprises composé de Balestra GC, Balestra TP, Spie, Sade, Claisse Environnement et Ramery TP.
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Le projet en détails
Dates clés
2017
2018-2019
2018-2021
2021-2023
Chiffres clés
1431
6 100 000
13 200
Résultats
- Triplement des capacités de stockage du bassin de refoulement
- Réduction des risques d'inondations
- Protection de la nappe phréatique
À retenir
La préservation du milieu naturel
La mobilisation de l'intelligence collective et la démonstration de notre adaptabilité
Du fait des caractéristiques du sous-sol déjà mentionnées, c'est un chantier qui s'est avéré particulièrement complexe
Ressources
La CALL investit à Loos-en-Gohelle pour la protection de la ressource en eau
Nord Littoral - 4 aout 2022