Berrien (29) sécurise son alimentation en eau potable en se raccordant à la commune voisine

Comment ce projet s’est-il imposé à l’agenda de votre commune ?

Début août 2022, en période de sécheresse, nous avons été surpris par la baisse de production d’eau. Il a fallu trouver une solution dans l’urgence. Il était nécessaire à la fois d’approvisionner les habitants et de garantir la circulation d’eau dans les canalisations pour éviter tout développement bactérien. Dans l’urgence, j’ai opté pour l’utilisation d’eau de la carrière de kaolin. Nous nous en sommes servis pour irriguer le pourtour du captage : l’eau s’infiltrait et alimentait la nappe phréatique. Une solution qui a fonctionné, mais a montré ses limites. En particulier, les premières analyses ont révélé une teneur en arsenic supérieure à la normale dans l’eau de la carrière. Teneur qui s’est révélée sous la norme une fois l’eau filtrée par le sol. Par précaution, nous avions demandé de ne pas consommer cette eau et avions mis à disposition des bouteilles. Notre solution avait été validée par l’ARS. Du reste, aujourd’hui le Département du Finistère envisage de faire de l’ancienne carrière une réserve d’eau.

Pour autant, il était important de disposer d’une solution pérenne et déjà étudiée. Réaliser des études complémentaires sur la pérennité de notre approche, obtenir un arrêté préfectoral et déployer la solution aurait nécessité quelques années. De son côté, la communauté de communes Monts d’Arrée Communauté avait déjà étudié le raccordement de Berrien au réseau d’eau de Scrignac, commune voisine. Il était envisagé à horizon 2030. Nous l’avons anticipé.

Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?

Pour notre solution d’urgence en août 2022, je me suis inspiré du passé. En effet, il y a quelques décennies, un hameau de la commune s’approvisionnait en eau potable avec la source qui alimente aujourd’hui la fosse de la carrière.

Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?

Pour l’utilisation de l’eau de la carrière de kaolin, nous ne disposions pas de référence, ni d’études.

La solution de raccordement au réseau de la commune de Scrignac que nous avons depuis mise en œuvre, s’adosse à une étude commandée par la communauté de communes et l’Agence de l’eau, réalisée par un bureau d’études. Il restait à définir le parcours des canalisations de raccordement et à préciser l’équipement nécessaire (diamètre des canalisations, puissance des pompes de refoulement…). Pour ce faire, nous avons missionné le bureau d’études qui avait déjà étudié cette solution pour la communauté de communes.

Par ailleurs, depuis l’épisode de sécheresse, nous avons consulté une société d’hydrogéologie pour savoir si creuser plus profondément le puits de notre captage pourrait suffire à éviter une pénurie d’eau. Ces études ont révélé l’existence d’une autre ressource près du captage. Si besoin, nous saurons qu’il y a une piste à explorer de ce côté.

Concernant les compétences, quelles sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?

Il faut bien connaître son propre réseau et les ressources aux alentours. La ressource ciblée doit être sérieusement étudiée pour s’assurer qu’elle soit suffisante pour garantir l’alimentation des deux communes. Cela dit, aujourd’hui les réflexions sur l’eau sont portées à l’échelle communautaire, ce qui permet cette vision plus large.

Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment avez-vous assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?

Pour la solution d’urgence, il n’y a pas eu de phase diagnostic ni planification. Il a fallu identifier et déployer une solution immédiatement. D’ailleurs nous étions tellement accaparés par le fait de trouver une option rapidement que nous n’avons pas pris le temps de bien communiquer dès les premiers jours. Nous avions édité un fascicule pour expliquer la situation et la solution, simple et clair, mais un peu trop tardivement. Notre approche a rencontré de la méfiance, voire de la défiance. Heureusement, l’éclairage apporté par un scientifique universitaire sollicité par des habitants méfiants, a calmé les craintes. Les agriculteurs, grands consommateurs d’eau, nous soutenaient.

Pour le raccordement au réseau de la commune voisine, en 2024, nous avons anticipé la communication. Nous l’avons expliqué dans le bulletin municipal et lors de la cérémonie des vœux début 2023.

Comment ce projet a-t-il été financé et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?

Nous avons choisi de procéder au raccordement au plus vite, sans attendre la prise de compétences par la communauté de communes, pour éviter toute nouvelle situation critique en cas de sécheresse. Heureusement, nous avons bénéficié de la Dotation d’Équipement des Territoires Ruraux de l’État, à hauteur de 40%, d’une aide de l’Agence de l’eau Loire Bretagne à hauteur de 30% et de l’aide du Département à hauteur de 10 %. Soit un total d’aide à 80% du montant. Il nous restait tout de même à supporter un coût de 170 000 €, qui est conséquent pour une commune comme Berrien. Nous avons réalisé un emprunt de 100 000 €.

Quels sont les autres acteurs qui ont vous ont accompagnés dans la préparation et la réalisation de ce projet ?

Lors de la sécheresse et pour notre solution d’urgence, nous avons pu compter sur la préfecture et sur l’ARS. La Préfecture me téléphonait régulièrement pour prendre des nouvelles et me conseiller, que ce soit pour la communication ou les travaux à réaliser. L’ARS aussi nous a aidés à gérer la crise. Pour le raccordement au réseau de Scrignac, nous avons missionné le bureau d’études qui avait réalisé les premières études pour la communauté de communes.