La Métropole de Nice (06) écoute les fuites pour mieux les déceler
La Métropole de Nice (06), à travers sa régie de distribution de l’eau potable Eau d’Azur reprise en 2014, expérimente la
pré-localisation pour la recherche de fuites grâce à des techniques acoustiques. En 2023, ce sont près de 112 alertes de fuites pré-localisées sur l’ensemble du réseau qui ont donné lieu à la confirmation de 69 fuites effectives ensuite réparées, sur l’ensemble des 795 fuites détectées sur l’année.
Pour mener à bien cette mission de recherche, 19 agents sont dédiés à cette tâche, dont 7 pour la seule pré-localisation acoustique. Un service qui ne cesse de s’étoffer et se perfectionner.
Entretien avec Fabrice Rifi, Responsable performance hydraulique au sein de la régie Eau d’Azur.
Ce projet est présenté par :
- Fabrice Rifi, Responsable performance hydraulique au sein de la régie Eau d’Azur.
Fabrice Rifi
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment le sujet de la recherche acoustique des fuites sur le réseau de distribution de l’eau potable s’est-il imposé à l’agenda de votre collectivité ?
La Métropole de Nice, via l’Etablissement public Industriel et Commercial Eau d’Azur créé en 2013, a repris à partir de 2014 la gestion du service public de l’eau potable et de l’assainissement pour les communes de son périmètre dont les contrats avec leur délégataire de service public arrivaient à échéance.
Aujourd’hui, cela représente 51 communes en gestion, pour environ 550 000 habitants. Au sein de cette gestion encore « récente », nous avons à cœur de préserver notre ressource de qualité en provenance directe des montagnes.
Pour en revenir à cette technique acoustique, qui existe déjà depuis de nombreuses années, l’enjeu est d’optimiser les recherches de fuites pour augmenter notre taux de rentabilité. La recherche acoustique est un outil, mais l’on se tourne également vers d’autres techniques de pré-localisation des fuites.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
A l’époque où le délégataire de service public était Véolia, il existait déjà un service de recherche de fuites. Lorsque la métropole a repris la délégation, elle a souhaité élargir et structurer davantage ce service dédié, en réunissant les compétences liées à la performance de distribution au sein d’un même service. C’est ainsi que certaines communes qui n’avaient jusque là jamais bénéficié d’un tel service de recherche acoustique ont pu en tirer profit et ainsi améliorer leur performance de distribution.
Est-ce qu’une étude de faisabilité ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Non, pas réellement car nous étudions cela en permanence. Nous avons mieux structuré le dispositif, et l’avons étendu à d’autres communes.
Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maitriser avant de se lancer dans ce projet ?
La formation à cette technologie est bien entendu obligatoire, mais nous accordons également beaucoup d’importance à la construction d’une stratégie pour « transmettre le savoir-faire ». Cela signifie que les experts de la régie Eau d’Azur, dans ce domaine de la recherche de fuites, forment les nouveaux arrivants en permanence, de façon à ce que leur expérience de terrain ne se perde pas. Et ce, d’autant qu’au sein de la métropole de Nice, nous avons un territoire très particulier avec une bande littorale, un moyen-pays et un haut pays jusqu’à 2000m d’altitude, avec toutes les contraintes géographiques et l’expérience que cela implique, à la fois d’un environnement très urbanisé comme d’un environnement naturel à la topographie contrainte.
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
Pour ce qui concerne la collectivité, les élus de la métropole siégeant au conseil d’administration sont pleinement impliqués dans la stratégie de la régie et guident également les choix d’orientation.
Plus globalement, améliorer la performance de distribution est un travail de l’ombre, qui fait aujourd’hui partie de l’expertise de la régie.
Du point de vue de l’adhésion des citoyens, je dirais qu’il se fait de manière très naturelle car lorsqu’ils rencontrent nos agents sur le terrain, ils sont souvent curieux de leur travail. Lorsqu’ils apprennent que nous sommes à la recherche de fuites sur le réseau avec diverses techniques, ils comprennent que cela s’inscrit dans une démarche globale de préservation de la ressource.
Comment la métropole a-t-elle financé le projet et quelles sont les aides sollicitées et obtenues ?
La régie finance directement une partie importante de ses investissements. Nous avons également reçu un soutien de l’agence de l’eau pour une partie du projet de pré-localisation et celui de la sectorisation du réseau par comptage.
Plus globalement, avec le soutien de l’ADEME, nous travaillons actuellement à la mise en place du projet « Hypervision » qui va nous servir à centraliser la gestion de la donnée et améliorer la gestion prévisionnelle du réseau et par conséquent la stratégie de performance hydraulique.
Plus concrètement, cela signifie que nous allons utiliser un système informatique couplé à de l’intelligence artificielle et des capteurs dédiés répartis sur le réseau souterrain du territoire (mesurant débit, bruits, qualité de l’eau..) afin d’obtenir une vision généralisée de ce qui se passe sur le service d’eau potable.
Ce projet novateur, qui, pour le moment, n’existe pas encore en France à cette échelle, va être une aide à la décision pour planifier la modernisation de notre réseau mais va surtout nous permettre de mieux anticiper les contraintes climatiques amenées à se généraliser. Pour vous donner un exemple, dans le cas de la sécheresse, le projet « Hypervision » va nous permettre d’optimiser les prélèvements.
La pré-localisation des fuites va également être pilotée, à terme, au sein du département « Hypervision ».
Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné la métropole dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
La réalisation de ce projet s’est faite sans appui extérieur.
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Le projet en détails
Dates clés
Entre 2014 & 2018
2019
2019
En cours
Chiffres clés
6
1 150
1 258 000
À retenir
En utilisant cette technique de recherche de fuite acoustique couplée à d’autres techniques comme par exemple l’achat d’images SAR, nous maitrisons mieux nos rendements. Et nous avons l’espoir à court terme d’obtenir une performance encore jamais connue au sein de l’entreprise;
A titre d’exemple, toutes techniques confondues, en 2023, nous avons localisé 795 fuites sur le réseau, contre 712 en 2022. Pour la recherche de fuites spécifiquement en pré-localisation, en 2023, sur 112 alertes, 69 ont fait l’objet d’une fuite confirmée puis réparée.
Toutes ces techniques visant à traquer les fuites et ainsi économiser la ressource nécessitent un très fort engagement humain. La recherche acoustique nécessite 7 personnes à temps plein, et la performance hydraulique, ce sont 19 personnes dédiées au sein de la régie qui compte près de 700 agents au total. Malgré l’amélioration de tous les outils techniques de détection de fuites, les moyens humains restent au cœur de notre dispositif : l’oreille humaine dans le cas de la pré-localisation est encore indispensable !
Ressources
Nice Matin - Savez-vous comment sont traquées les fuites d'eau à Nice?
Lorsqu’une fuite d’eau est détectée, une équipe de REA intervient pour la colmater. La première difficulté consiste à l’atteindre