A Ezanville (95), le Petit Rosne a retrouvé son aspect naturel
À Ézanville, le SIAH Croult a mené la réouverture à ciel ouvert de 220 mètres du Petit Rosne, anciennement busé sous la ville. Ce projet ambitieux, achevé en 2023, visait à restaurer un cours d’eau disparu, améliorer la gestion des crues, renforcer la biodiversité locale et offrir un nouvel espace paysager aux habitants.
Cofinancé par l’Agence de l’eau Seine-Normandie, la Région Île-de-France, le Département du Val-d’Oise et le SIAH, il illustre une démarche exemplaire de renaturation urbaine. Cette opération s’inscrit dans un programme plus large porté par le Syndicat pour réconcilier ville et milieu naturel.




Entretien avec Éric Chanal, directeur général du SIAH Croult

Ce projet est présenté par :
- Éric Chanal, directeur général du SIAH Croult
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment le projet de réouverture du Petit Rosne s’est-il imposé à l’agenda du SIAH Croult ?
La réouverture du Petit Rosne à Ézanville s’est imposée assez naturellement dans notre stratégie d’aménagement. Cela faisait longtemps qu’on observait un certain nombre de dysfonctionnements liés à l’enfouissement du cours d’eau : un écoulement perturbé, une capacité hydraulique limitée, et surtout une discontinuité écologique et paysagère forte en plein centre-ville. Le SIAH porte depuis des années une politique active de renaturation et de restauration avec plusieurs opérations similaires déjà menées sur le Croult ou le Petit Rosne en aval. Dans ce contexte, le site d’Ézanville représentait un potentiel évident. Le cours d’eau avait disparu et il y avait une réelle opportunité de remettre de la nature en ville et de gérer plus durablement le risque inondation. Le projet s’est aussi imposé grâce à une vraie convergence de volontés : du côté du syndicat bien sûr, mais aussi de la commune d’Ézanville et de nos partenaires techniques et financiers. Tous ont rapidement vu l’intérêt du projet. À un moment donné, toutes les planètes étaient alignées : le moment était bon, les moyens étaient là et la volonté politique aussi.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
Nous avons pu nous appuyer sur plusieurs expériences passées, et notamment sur les projets que nous avions déjà menés dans d’autres communes du territoire. Je pense par exemple à la renaturation du Petit Rosne à Sarcelles-village ou à celle du Croult à Gonesse-secteur Vignois. Ces projets nous ont permis de constituer une véritable culture opérationnelle autour de la réouverture de rivières urbaines. Ils ont aussi servi à convaincre les élus et les partenaires que ce type d’intervention, parfois perçu au départ comme un peu audacieux, pouvait avoir des effets très concrets et positifs. En parallèle, on s’est également nourris de ce qui se faisait ailleurs en France, car la dynamique de renaturation prend de l’ampleur dans beaucoup de territoires. On observe, on échange, on partage. Il y a aussi une forme d’intelligence collective à l’échelle des syndicats et des acteurs de l’eau. Enfin, ce sont parfois les contraintes locales qui inspirent : ici, la configuration du site, les attentes de la commune, le besoin de désimperméabiliser… Tout cela nous a guidés. On ne fait jamais un simple copier-coller. Chaque projet a sa singularité, mais on s’appuie clairement sur les acquis pour progresser.
Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Oui, bien entendu. Comme pour tout projet de renaturation, une étude complète a été réalisée, intégrant les dimensions hydrauliques, techniques, paysagères et urbaines. Elle nous a permis de valider que la réouverture du Petit Rosne était non seulement possible, mais opportune. Ce qui a été déterminant, c’est que dès l’examen du dossier, on a vu que ce n’était pas un site compliqué. Il n’y avait pas de contraintes majeures sur les réseaux, peu d’obstacles fonciers, et la topographie s’y prêtait bien. On savait donc que la mise en œuvre serait facilitée. Le linéaire limité du projet et l’absence d’impacts majeurs sur les réseaux ou fonciers ont permis de rester sous les seuils réglementaires imposant une enquête publique. Cela a été un vrai levier pour gagner du temps, en réduisant les délais administratifs sans rien sacrifier à la concertation. En somme, tous les feux étaient au vert, et cette phase d’étude nous a permis d’ajuster finement le projet, en intégrant des aménagements comme une passerelle, des berges végétalisées, ou encore une gestion douce des crues. C’est une étape indispensable, mais ici elle a été fluide et structurante.
Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?
Un projet comme celui d’Ézanville demande une vraie multidisciplinarité. On est loin d’un simple chantier de génie civil : il faut mobiliser à la fois des compétences en hydraulique, en écologie, en paysage, en concertation et en conduite de projet public. On travaille sur de la restauration écologique, mais aussi sur l’espace public, en lien avec des enjeux d’urbanisme, de biodiversité et d’acceptabilité sociale. Cela demande à la fois des ingénieurs, des écologues, des paysagistes, mais aussi des élus engagés et des agents capables de faire le lien entre les attentes du territoire et les contraintes techniques. Il faut aussi savoir embarquer les partenaires dans une dynamique collective. Et puis, au-delà des compétences individuelles, c’est l’intelligence collective qui fait la réussite : une maîtrise d’œuvre qui écoute le terrain, une entreprise de travaux souple et attentive, une commune impliquée dans les choix d’aménagements… C’est cette alchimie qui permet à un projet de sortir non seulement techniquement, mais avec du sens. Aujourd’hui, porter un projet d’eau, c’est porter un projet de territoire. Il faut une culture technique, mais aussi une vraie conscience des enjeux environnementaux et sociétaux.
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment avez-vous assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
Au-delà d’une simple adhésion, ce qu’on cherche dans ce type de projet, c’est à fédérer. Fédérer les habitants, les élus, les partenaires autour d’un projet commun, porteur de sens. Et ça, ça ne se décrète pas. Ça se construit dans le temps, par des échanges, des actions visibles, de la pédagogie. Sur le plan technique, bien sûr, le dimensionnement a été rigoureux : modélisations hydrauliques, études de crues, intégration fine dans le tissu urbain. Mais ce n’est pas ça qui fait vivre un projet. Ce qui compte, c’est de réussir à transmettre une vision. Et parfois, cela passe par des choses très concrètes. J’ai par exemple emmené le maire et plusieurs élus d’Ézanville sur d’autres sites de renaturation, pour leur faire voir, toucher, entendre ce qu’est une rivière réouverte. Rien ne vaut l’expérience directe. Et ça a marché. Il y a aussi eu un vrai effort de communication : la commune a été très présente, on a ouvert une page Facebook dédiée au chantier, pour documenter l’avancement, à l’instar de ce que qu’on avait bien fait à Gonesse. Et moi, très sincèrement, je reste toujours ému d’entendre à nouveau couler l’eau. Ce bruit-là, il dit qu’on a redonné vie à quelque chose. Et je pense que les habitants le ressentent aussi.
Comment a été financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées et obtenues ?
Le financement du projet s’est structuré autour d’un scénario technique ambitieux, justement parce que ce sont souvent ces projets complets, bien construits et porteurs d’enjeux multiples (hydrauliques, écologiques, urbains) qui obtiennent le meilleur soutien. Dès le départ, nous savions que ce type de démarche serait bien accompagné si nous allions au bout de la logique de renaturation. Et cela s’est vérifié. Le coût total des travaux s’élève à 1 651 160 euros hors taxes. Il a été financé à 45 % par l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, particulièrement engagée sur ce type de projets, à 13 % par le Département du Val-d’Oise et à 10 % par la Région Île-de-France. 31 %, ont été pris en charge par le SIAH lui-même. Ce modèle de cofinancement montre que lorsqu’un projet est techniquement solide, bien préparé et en phase avec les politiques publiques, les partenaires sont présents. Il ne s’agit pas seulement de demander des subventions, mais de proposer une vision cohérente et ambitieuse pour le territoire.
Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné le SIAH Croult dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
Le premier partenaire clé, ça a été la commune d’Ézanville. Le maire et ses équipes ont été très engagés dès le départ. Ce n’est pas si fréquent de voir une commune aussi impliquée sur un projet de renaturation : ils ont tout de suite compris les enjeux, notamment en matière d’aménagement urbain, de cadre de vie et de gestion des eaux pluviales. On a travaillé main dans la main, en allant sur le terrain, en échangeant sur les choix d’aménagement, en organisant des visites d’autres sites pour nourrir leur vision.
Ensuite, il y a eu l’appui des partenaires financiers : l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, la Région Île-de-France et le Département du Val-d’Oise. Leur accompagnement a été déterminant, à la fois en termes de financement, mais aussi de reconnaissance institutionnelle du projet. Sur le plan opérationnel, la maîtrise d’œuvre (Egis/ UrbanWater) a apporté une vraie qualité technique et une grande capacité d’écoute. L’entreprise Terideal a assuré les travaux avec beaucoup de rigueur. Finalement, ce projet n’est pas celui d’un acteur seul, c’est une dynamique collective qui a permis d’aller au bout.
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Le projet en détails
Dates clés
Janvier 2022
Automne 2022
1er juillet 2023
Chiffres clés
220
13000
2500
Résultats
Cette dynamique fonctionne dès lors qu’on y croit ensemble : les élus, les techniciens, les partenaires. C’est un projet profondément positif, qui montre ce que peut être une politique publique ambitieuse en matière d’eau et d’aménagement.
À retenir
La démonstration qu’une rivière réouverte, ce n’est pas seulement un ouvrage hydraulique ou un outil de prévention des crues. C’est un projet de transformation du quotidien. On a redonné vie à un lieu. La biodiversité n’a pas besoin qu’on l’impose : elle revient dès qu’on lui en donne les moyens.
Pour les habitants, ce n’est pas anecdotique. C’est une nouvelle centralité, un lieu où se reconnecter à l’environnement. D’un point de vue technique, tout s’est bien passé. Il n’y a pas eu de gros aléa, ce qui est rare dans les chantiers en zone urbaine.
Je ne parlerais pas de points négatifs, mais plutôt de points de vigilance. Un projet comme celui-là transforme profondément un lieu, et cette transformation peut parfois heurter certaines habitudes ou attachements locaux. À Ézanville, par exemple, il y avait une petite mare et un tilleul à l’endroit même où le Petit Rosne a été réouvert. Certains habitants y étaient très attachés, à juste titre. Mais on ne pouvait pas maintenir ces éléments tels quels.
Ressources
SIAH - Inauguration du Petit Rosne à Ezanville
Ce samedi 1er juillet 2023, la rivière « le Petit Rosne » était à l’honneur à Ezanville (Val d’Oise) pour son inauguration en présence de Madame Marie-Christine Cavecchi, présidente du Département du Val d’Oise, de Monsieur Eric Battaglia, Maire d’Ezanville et de Monsieur Didier Guével, 1er vice-président du SIAH Croult et Petit Rosne.
Les partenaires de ce projet

Agence de l'eau Seine Normandie

Région île de France

Département du Val d'Oise
Les acteurs de la filière eau impliqués dans ce projet
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Données de contact
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