Grand Montauban (82) : un modèle de résilience et d’innovation autour de la gestion de l’eau
Face aux défis climatiques et à une démographie en forte croissance, le Grand Montauban a investi 40 millions d’euros pour moderniser ses deux stations d’eau potable situées à Bressols et Albefeuille-Lagarde, et valoriser les boues d’épuration grâce à la méthanisation.
Ce projet a permis de résoudre les limites des infrastructures vieillissantes en sécurisant l’approvisionnement en eau pour 6 000 habitants, tout en réduisant l’impact environnemental et en valorisant l’énergie produite.
Grâce à une gestion intégrée et des solutions innovantes, le Grand Montauban a démontré comment relever les défis de demain avec durabilité et efficacité.
Entretien avec Marie-Claude Berly, maire de Montauban, présidente du Grand Montauban communauté d'agglomération
Ce projet est présenté par
- Marie-Claude Berly, maire de Montauban, présidente du Grand Montauban communauté d’agglomération
Marie-Claude Berly
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment le projet de modernisation des infrastructures hydriques du Grand Montauban s’est-il imposé à l’agenda de votre collectivité ?
Depuis 2008, le Grand Montauban, territoire regroupant 85 000 habitants, a pris conscience de l’urgence de moderniser ses infrastructures hydriques. Ce besoin a été accéléré par le changement climatique, impactant lourdement l’agriculture locale. Les gelées tardives, par exemple, affectent les cultures arboricoles et nécessitent des techniques comme l’antigel qui exige une disponibilité accrue en eau.
Le territoire, traversé par le Tarn et l’Aveyron, disposait d’équipements vieillissants qui répondaient difficilement aux besoins croissants. En parallèle, la loi MAPTAM (2014) a transféré aux agglomérations la compétence « eau et assainissement », renforçant l’urgence de structurer une gestion durable et anticipée. Entre 2008 et 2024, la démographie du Grand Montauban a connu une croissance soutenue, avec environ 1 600 nouveaux habitants par an ce qui a augmenté la pression sur des réseaux déjà fragiles. Un exemple concret avec les fuites qui ont atteint jusqu’à 15 % des volumes distribués…
Le diagnostic réalisé en 2018 a révélé la vétusté des deux stations d’eau potable et des difficultés à gérer les boues d’épuration. Face à ces constats, un projet global et durable a été conçu, intégrant des dimensions environnementales, sécuritaires et économiques. Le parc actuel comprend deux stations principales et 150 km de réseau de distribution.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
Le Grand Montauban a tiré parti d’expériences similaires menées dans des agglomérations comme Bordeaux Métropole et Toulouse Métropole. Ces territoires ont servi de références pour la modernisation des infrastructures, en particulier pour intégrer des technologies durables et des systèmes de gestion avancés.
Au-delà des aspects techniques, la collectivité s’est inspirée de démarches participatives, observées notamment à Nantes, où les citoyens sont associés aux décisions structurantes dès la phase de planification. Des échanges ont également été organisés avec des communautés rurales ayant expérimenté des solutions innovantes, comme l’irrigation optimisée et la gestion intelligente des ressources en eau.
En parallèle, une analyse locale approfondie a permis de hiérarchiser les priorités : moderniser les stations, réduire les pertes d’eau et valoriser les boues d’épuration.
Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Plusieurs études ont jalonné la phase préparatoire. Outre le diagnostic technique réalisé en 2018 qui a mis en avant des fragilités majeures avec des pertes importantes sur les réseaux (jusqu’à 20 % des volumes distribués), une étude d’impact environnemental, menée sur 12 mois, a analysé les cycles biologiques locaux, incluant la nidification des oiseaux et les habitats aquatiques. Certains travaux ont par exemple été planifiés en dehors des périodes sensibles pour la faune afin de minimiser les perturbations.
Enfin, une évaluation économique a permis de prioriser des solutions à faible coût d’exploitation à long terme, comme l’installation de turbines pour produire de l’énergie à partir des flux d’eau traitée. Ces études ont permis d’optimiser chaque choix technique, tout en respectant les contraintes réglementaires et environnementales.
Résultat : les équipements sont pensés pour durer, avec des coûts optimisés, tout en anticipant les évolutions réglementaires et climatiques.
Concernant les compétences, quelles sont celles à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?
Côté technique, il faut évidemment maîtriser l’hydraulique, le génie civil et les technologies de traitement de l’eau. L’environnement occupe également une place centrale, avec des spécialistes en biodiversité, urbanisme et réglementation écologique mobilisés pour limiter les impacts.
La coordination est aussi essentielle. La gestion d’un projet d’une telle ampleur implique des compétences solides en planification, communication et concertation. Impliquer les citoyens, anticiper les attentes des riverains et dialoguer avec les services de l’État nécessitent une approche humaine autant que technique.
Enfin, le volet financier et administratif est tout aussi crucial. De la négociation des subventions au suivi des dépenses en passant par la gestion des délégations de service public, tout doit être millimétré. C’est ce savant mélange de savoir-faire technique, humain et organisationnel qui a permis au Grand Montauban de mener ce projet avec succès, tout en s’assurant de son acceptabilité sociale et environnementale.
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
Le Grand Montauban a misé sur la transparence pour engager les citoyens. Des réunions publiques, organisées dans les quartiers, ont permis d’expliquer les enjeux et de répondre aux interrogations des habitants. Les comités consultatifs de quartier ont relayé des informations accessibles à tous.
Pour renforcer l’adhésion, la collectivité a organisé des visites pédagogiques sur les sites des stations d’eau potable, notamment pour les scolaires. Ces actions éducatives ont permis de sensibiliser les plus jeunes aux enjeux de l’eau.
Enfin, des simulations économiques et techniques ont été partagées, montrant comment chaque euro investi répondait à des objectifs concrets de sécurité et durabilité. Cette démarche participative a renforcé la confiance et la cohésion autour du projet.
Comment la collectivité a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?
Le financement repose sur un montage public-privé mixte, avec une enveloppe globale de 40 millions d’euros.
- Délégataires de service public (Veolia) : 43 % des investissements, amortis sur 20 à 25 ans.
- Agence de l’eau Adour-Garonne : 11 % du coût total, via des subventions ciblées.
- Conseil départemental du Tarn-et-Garonne : 27 %.
- Banque des Territoires : prêts à taux préférentiels pour alléger la charge budgétaire.
Cette combinaison de subventions et de partenariats stratégiques a permis de limiter l’impact financier sur le budget local tout en garantissant un projet ambitieux.
Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné la collectivité dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
Outre Veolia, le projet a mobilisé plusieurs acteurs locaux et nationaux :
- Des bureaux d’études spécialisés (ex. Hydratec) pour les diagnostics techniques et environnementaux.
- Des entreprises locales de travaux publics pour la rénovation des stations et des réseaux.
- Des associations environnementales locales, comme Nature Tarn-et-Garonne, pour valider les mesures de préservation écologique.
- La Banque des Territoires et l’Agence de l’eau pour le financement et l’expertise.
Un volet inclusif, incluant des clauses d’insertion sociale, a permis d’offrir des opportunités professionnelles à des personnes éloignées de l’emploi.
Profitez d’une offre de financement des projets en faveur de l’environnement : gestion de l’eau, etc.
Le projet en détails
Dates clés
2018
2018 - 2020
2020
2022
Chiffres clés
40
6000
10 à 20
Résultats
- Une sécurité renforcée pour la production en eau
À retenir
Un impact environnemental réduit grâce à l’utilisation de technologies durables comme la méthanisation des boues et à la réduction des consommations d’énergie et d’eau
Un modèle inclusif et solidaire : des clauses d’insertion sociale prévues dans les marchés publics ont permis de réserver une partie des heures de travail, entre 10 et 20 %, à des personnes éloignées de l’emploi. En collaboration avec les structures locales d’insertion et les entreprises impliquées dans les travaux, cette initiative a favorisé la création d’opportunités professionnelles locales
Des délais administratifs longs concernant les autorisations ont généré 18 mois supplémentaires ! Une communication initiale insuffisante : bien que des efforts aient été faits pour informer les citoyens, un dialogue plus précoce aurait renforcé l’adhésion citoyenne. Une anticipation réglementaire limitée : certaines contraintes, comme l’interdiction d’installer des panneaux photovoltaïques en zones PPRI, auraient pu être mieux intégrées dès le départ.
Ressources
La dépêche - Grand Montauban : une production d’eau potable bientôt plus sûre et durable
D’ici quelques mois, le Grand Montauban inaugurera une usine de production d’eau potable à Planques, suivie d’une seconde à Fonneuve en 2026