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La métropole de Lyon (69) teste l’assainissement de demain, via la valorisation des urines à des fins agricoles

Matière organique à fort pouvoir fertilisant, comme le lisier ou le fumier issus d’autres mammifères, l’urine humaine possède de nombreux nutriments (azote, phosphore, potassium, etc.) utiles aux productions agricoles. Traitée en format solide ou liquide, elle peut apparaître comme un bon complément vis-à-vis des engrais de synthèse, réduisant ainsi les coûts d’importation pour les agriculteurs. Si la collecte d’urine peut s’inscrire dans une économie locale et circulaire, le choix de valorisation de cette matière à des fins agricoles, peut également réduire le traitement des eaux usées en station d’épuration, et permettre quelques substantielles économies.

Les matières organiques sont causes de pollution pour les cours d’eau, mais également des ressources pour les sols. Cela implique une collecte de l’urine directement à la source, brute, non mélangée à des eaux de voiries ou industrielles. La métropole de Lyon s’est saisie de ce sujet afin de mettre en place une expérimentation pouvant aboutir à la mise à l’échelle d’un projet global d’économie circulaire. Une première expérimentation a été mise en place en avril 2024 avec la collecte d’urines lors d’un festival utilisant des toilettes sèches (urinoirs secs) permettant un épandage sur une parcelle à Quincieux de maïs-grains.

Les résultats comparatifs après récolte en novembre 2024 montrent que les rendements à l’hectare sont similaires qu’avec un engrais de synthèse. « Cela penche donc en faveur d’un pouvoir fertilisant égal à l’urée de synthèse », indique Maurane Valdelfener, cheffe de projet à la Direction Cycle de l’Eau du Grand Lyon. Ainsi, l’expérimentation se poursuit, avec cette question : « Si demain, le projet passe à l’échelle et est amené à se démocratiser, quels seront les leviers et les freins ? »

Entretien avec Maurane Valdelfener, cheffe de projet à la Direction Cycle de l’Eau du Grand Lyon

Parole de collectivité
Maurane Valdelfener, cheffe de projet à la Direction Cycle de l’Eau du Grand Lyon - Crédits photo : Maurane Valdelfener
Assainissement des eaux usées

Ce projet est présenté par:

  • Maurane Valdelfener, cheffe de projet à la Direction Cycle de l’Eau du Grand Lyon.
100 % des urines des Français pourraient fertiliser 15 % de la Surface Agricole Utile (à consommation égale d’engrais de synthèse aujourd’hui)
Maurane Valdelfener

Parole de collectivité

Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action

Comment le projet KOLOS s’est‐il imposé à l’agenda de votre collectivité ?

L’idée a été proposée par le Laboratoire Eau Environnement Systèmes Urbains (Leesu) au cabinet du président du Grand Lyon pour réaliser un site d’expérimentation. D’autres projets avaient déjà été réalisés en France, et nous devions nous en saisir. Un passage à l’échelle sur la métropole de Lyon serait en effet conséquent et impactant pour le Rhône et la Saône. Par ailleurs, cela pourrait répondre au Plan Alimentation qui cherche à développer les agricultures locales et les circuits courts.

Ainsi, le projet s’est déroulé selon trois axes. Le premier axe concerne le positionnement des acteurs concernant la philosophie du projet. Quelles sont les conditions d’acceptation de la valorisation de la matière, une matière organique composée de nutriments mais aussi potentiellement d’indésirables (bactéries pathogènes, résidus de médicaments, micropolluants).

Le second axe de ce projet vise à créer un démonstrateur d’épandage en plein champ. Nous nous sommes focalisés sur l’urine qui possède moins de pathogènes que la matière fécale, plus facile à hygiéniser et donc à stocker. Un travail de recherche de gisement a permis d’observer l’usage de toilettes sèches lors de festivals. Ensuite, il a fallu se poser la question des raccordements, de l’odeur de l’épandage, du rendement agricole.

Le troisième axe s’intéresse au dimensionnement du projet, à la scénarisation de secteurs qu’il pourrait être intéressant de déconnecter du réseau d’assainissement, hors eaux grises, afin de collecter urines et matières fécales. Leur pertinence dépend aussi de la fréquentation.

Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?

Nous avons observé la bibliographie du programme OCAPI (Programme de recherche & action sur les systèmes alimentation/excrétion et la gestion des urines et matières fécales humaines), et de leurs projets sur la région parisienne.

Nous avons découvert qu’un produit à base d’urine était déjà vendu dans le commerce, un biostimulant, un support de culture. Ce qui prouve que certains modèles économiques existent déjà.

Est‐ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?

Le projet KOLOS en lui-même est une étude de faisabilité. Il s’agit de quantifier le potentiel et l’impact sur la station d’épuration, d’une collecte à la source. A partir de quel moment cela devient notable en matière de réduction de l’azote, qui induit une meilleure facilité de traitement (moins de réactifs, moins d’énergie) et une réduction du rejet dans le milieu naturel.

Cependant, nous avons réalisé des analyses sur le lisain (urines humaines brutes stockées), la recherche bactériologique, la présence d’éléments et traces métalliques, les résidus médicamenteux et plastiques. Il n’existe pas de grille d’évaluation, aussi nous en avons élaborée une, qui va plus loin que ce qui caractérise le fumier et le lisier. Vous pouvez consulter le cahier d’expérimentation ou une note qui traite de la question des indésirables potentiellement présents dans les fertilisants à base d’urine.

En théorie, cette solution permettrait de réaliser des économies d’eau dans les toilettes, de s’intégrer dans une économie circulaire permettant une souveraineté locale en matière de production d’engrais, ainsi qu’un effet positif sur le milieu aquatique.

Concernant les compétences, quelles sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?

Les compétences portent sur les connaissances en chimie, le cycle de l’azote et le cycle de l’eau. Également sur l’appréhension du jeu d’acteurs sur le territoire : privé et public. Les loueurs de toilettes sèches, les vidangeurs, les agriculteurs et coopératives, la Chambre d’Agriculture, les élus, les techniciens de la métropole. Sans compter les membres du laboratoire de recherche Leesu et du programme OCAPI.

Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a‐t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?

Les citoyens ne sont pas la cible première du projet. Il s’agit en priorité des agriculteurs. Pour autant, des animations ont été organisées à Quincieux, notamment lors d’un festival durant lequel Florent Brun, coordinateur du projet KOLOS, au sein du programme OCAPI, a tenu un stand de crêpes réalisées à partir de farine de blé fertilisé à l’urine. Cela a permis d’ouvrir les débats. Dans les milieux ruraux, les toilettes sèches sont connues. Mais l’usage d’urine en fertilisant un peu moins. Cela mérite d’être expliqué. Puis, en tant qu’utilisateur, on peut se poser la question de l’usage de ces toilettes sèches : comment je les nettoie, comment je les vidange, tous les combiens, si j’ai mes règles, est-ce que je peux les utiliser ? Des questions pratico-pratiques. La philosophie globale est comprise, mais reste à la rendre acceptable dans l’utilisation quotidienne, pour qu’elle reste confortable. Suivant la solution préconisée à l’issue de l’étude, nous verrons ce qui est le plus pertinent : déconnecter du réseau d’assainissement des maisons individuelles ou des établissements recevant du public.

Comment la métropole de Lyon a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?

Au total, le projet a nécessité 720 000 € de budget en temps hommes et en ingénierie (études, enquêtes, rapports, modélisation, scénarisation…). Les études et analyses ont été autofinancées à 60% par le laboratoire LEESU et TBI (TBI Toulouse Biotechnology Institute) et 40% par la métropole de Lyon qui a utilisé son budget assainissement.

Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné le Grand Lyon dans la préparation et la réalisation de ce projet ?

Florent Brun, coordinateur du projet KOLOS, au sein du programme OCAPI, a réalisé les entretiens préalables à sa réalisation avec des agriculteurs, des coopératives, les services techniques eau et assainissement du Grand Lyon ainsi que les élues et élus liés à l’agriculture, aux déchets et l’eau pour connaître le positionnement de chacun.

Le projet s’est déployé sur les territoires de Quincieux de Lissieu, deux communes périurbaines au nord du Grand Lyon. Dotées de petits systèmes d’assainissement, avec chacune sa station d’épuration, elles facilitent la mesure d’impact d’une déconnexion d’une partie du territoire du réseau d’assainissement. Florent Brun y a réalisé des animations dans les champs auprès d’agriculteurs, de coopératives, des acteurs locaux, des associations et d’autres collectifs intéressés par la démarche. Vous pouvez consulter la galerie de témoignages des acteurs.

Sont également en collaboration : la PEQ, association pour la Protection de l’Environnement de Quincieux, le festival Saon’automne, la Chambre d’agriculture du Rhône, l’entreprise TLB du Rhône, l’agriculteur Gilbert Bouricand, l’école d’agronomie de Lyon ISARA ainsi que le CentSept un accélérateur d’innovation sociale et solidaire.

Un collectif indépendant s’est monté en 2024 : UrivaLyon, qui va mettre tous les acteurs de la filière en mouvement pendant les prochaines années pour que le gisement d’urine soit suffisant afin d’être collecté et qu’il réponde aux besoins des agriculteurs.

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Le projet en détails

Dates clés

2022

Mise à l’agenda

2023

Inspirations et Compétences

2024 – 2025

Réalisation

Avril 2024 - Novembre 2024

Premier épandage et Récolte

Chiffres clés

100 %

des urines des Français pourraient fertiliser 15 % de la Surface Agricole Utile

720 000

euros de budget

10

m3 épandus

Résultats

  • 29 000 m2 de parcelle agricole, dont 23 000 m2 fertilisée avec de l’urée de synthèse, 3 000 m2 de témoin et 3 000 m2 enrichi en lisain, urine stockée.

À retenir

La philosophie du projet est sensée

L’adhésion autour de cette philosophie est stimulante : utiliser moins d’eau, valoriser la matière, être autonome sur les engrais. Enfin, avoir des cours d’eau moins pollués par les nutriments.

La logistique reste à construire. Les plateformes de stockage et le transport nécessitent d’être plus structurés et standardisés pour faciliter la gestion des flux

Ressources

KOLOS - OCAPI

L’objectif du projet de recherche-action KOLOS (Kopros pour les excréments et Tholos la circularité) est de conduire une analyse sociotechnique de la mise en place, de la genèse à l’opérationnalité, de la séparation à la source des urines et matières fécales pour les systèmes d’assainissement de petites collectivités de 200 à 10 000 EH

Les partenaires de ce projet

LOGO_Metropole Grand Lyon

Métropole Grand Lyon

Lyon Isara

Lyon ISARA

logo PEQ

Association PEQ

logo-cent-sept

Le CentSept

RS-Visuel-non-disponible-150x150

Chambre d’agriculture du Rhône

RS-Visuel-non-disponible-150x150

Commune de Quincieux

RS-Visuel-non-disponible-150x150

Commune de Lissieu

Les acteurs de la filière eau impliqués dans ce projet

laboratoire-leesu

LEESU

Toulouse Biotechnology Institute

Toulouse Biotechnology Institute

TLB du Rhône

TLB du Rhône

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habitants

1,4 millions

Données de contact

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