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Fin du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement en 2026 : ce qu’il faut savoir

Cet article a été rédigé par Romain Delfosse

Crédits photos : Fontaine, Parc de la Garenne à Nérac - Sébastien Laffitte

Depuis la promulgation de la loi NOTRe en 2015, les collectivités territoriales s’étaient engagées dans un processus progressif de transfert des compétences eau potable et assainissement aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. Mais ce calendrier a été modifié à plusieurs reprises, jusqu’à connaître un tournant décisif avec la loi n°2025-327 du 11 avril 2025, qui acte la suppression du transfert obligatoire au 1er janvier 2026. Retour sur l’évolution du cadre juridique et les implications concrètes pour les élus locaux.

Cette annonce répond aux préoccupations exprimées par de nombreux élus locaux qui craignaient de perdre le contrôle sur ces services essentiels.

Les raisons derrière cette décision

Cette annonce s’inscrit dans un contexte plus large de réflexion sur la gestion de l’eau en France. Lors de sa déclaration de politique générale le 1er octobre 2024, Michel Barnier a également annoncé la tenue prochaine d’une grande conférence nationale sur l’eau. Plusieurs facteurs ont probablement motivé cette décision, notamment la volonté de préserver l’autonomie des communes, de tenir compte des spécificités locales et de répondre aux inquiétudes des élus locaux quant à la perte de contrôle sur des services essentiels à la population.
L’impact de cette décision sur la gestion de l’eau et de l’assainissement reste à évaluer. D’un côté, elle pourrait permettre une gestion plus proche des réalités locales. De l’autre, elle pourrait limiter les économies d’échelle et la mutualisation des moyens que le transfert obligatoire visait à réaliser. Les enjeux de modernisation des infrastructures et de protection de la ressource en eau devront être abordés, quelle que soit l’échelle de gestion choisie.

Impact et actions territoriales : ce que les collectivités doivent anticiper

La fin du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement ne signifie pas pour autant l’absence d’engagement de la part des collectivités. Elle marque au contraire le passage d’un cadre contraint à une logique de responsabilité locale. Les communes et intercommunalités conservent un rôle central dans l’organisation de ces services publics essentiels, et doivent désormais définir elles-mêmes le mode de gestion le plus adapté à leur réalité territoriale.

Dans cette nouvelle configuration, chaque collectivité est appelée à évaluer sa situation de manière approfondie. Il s’agit de faire le point sur les compétences actuellement exercées, qu’il s’agisse de la production et de la distribution d’eau potable, de l’assainissement collectif ou non collectif, ou encore de la gestion des eaux pluviales. Cette cartographie doit être croisée avec une analyse des performances actuelles du service, à partir des indicateurs réglementaires disponibles (RPQS, SISPEA, taux de conformité, etc.), ainsi qu’avec les capacités d’action de la collectivité : moyens techniques, personnels, ingénierie disponible, situation budgétaire et perspectives d’investissement.

Une fois ce diagnostic établi, les élus devront arrêter leur choix d’organisation avant le 31 décembre 2025. Plusieurs options s’offrent à eux : certaines communes choisiront de conserver l’exercice direct de la compétence, tandis que d’autres préféreront formaliser une délégation par leur intercommunalité, ou se regrouper dans un syndicat. Il est également possible de combiner ces solutions selon les compétences concernées (eau potable, assainissement, eaux pluviales) ou selon les secteurs du territoire. Quelle que soit l’option retenue, elle devra être traduite dans des délibérations formelles, accompagnées le cas échéant de conventions de gestion ou de nouveaux statuts, à établir d’ici au 30 juin 2026.

Pour guider les collectivités dans cette démarche, plusieurs ressources sont à leur disposition. La Direction générale des collectivités locales (DGCL) a publié en juillet 2025 une foire aux questions actualisée (Foire aux questions relative à la prise des compétences « eau » et « assainissement » par les communautés de communes), qui apporte des réponses concrètes aux interrogations juridiques, techniques et budgétaires des élus. Elle précise notamment les possibilités de délégation entre EPCI et communes, les conséquences d’un changement d’organisation sur les agents ou sur les contrats en cours, ou encore les règles applicables aux syndicats infracommunautaires. Ce document peut être téléchargé sur le site des collectivités locales.

D’autres organismes, comme l’Association des Maires de France (Clarification des nouvelles règles de transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes après la loi du 11 avril 2025 et Intercommunalités de France (Note juridique : Compétences « eau » et « assainissement » des communautés de communes depuis la loi du 11 avril 2025), ont également publié des fiches pratiques et des retours d’expérience pour aider les territoires à structurer leur réflexion. La Banque des Territoires et l’équipe Aquagir proposent enfin un accompagnement sur mesure, adapté aux spécificités locales et aux besoins des élus.

Dans tous les cas, la période qui s’ouvre constitue une opportunité pour repenser la gouvernance de l’eau à l’échelle locale, renforcer les coopérations là où elles sont pertinentes, et mettre en place des organisations plus résilientes face aux défis environnementaux et techniques à venir.

Par ailleurs, une grande conférence nationale sur l’eau est prévue fin 2025 pour rediscuter du rôle de chaque échelon dans la gouvernance de la ressource.

Les conséquences de la fin du transfert pour les collectivités territoriales

Avec cette annonce, les collectivités territoriales conserveront la possibilité de choisir l’échelon le plus approprié pour gérer l’eau et l’assainissement. Cela implique de nouvelles responsabilités en termes de prise de décision et de planification à long terme. Les communes devront évaluer leur capacité à gérer ces services de manière autonome ou l’intérêt d’un transfert à l’intercommunalité.

L’avenir de la gestion de l’eau et de l’assainissement en France se dessine désormais de manière plus flexible. Les collectivités devront faire des choix stratégiques en tenant compte des enjeux techniques, financiers et environnementaux. La coopération intercommunale restera un outil important, même si elle ne sera plus obligatoire.

Cette décision aura un impact sur les ressources des collectivités territoriales. Les communes qui choisiront de conserver ces compétences devront s’assurer de disposer des moyens techniques et financiers nécessaires. Pour les EPCI, l’absence de transfert systématique pourrait modifier leurs perspectives budgétaires et leurs plans d’investissement.

Les conséquences de la fin du transfert pour les EPCI

Les Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) sont des structures administratives regroupant plusieurs communes afin d’exercer certaines compétences en commun. Ils permettent de mutualiser les ressources et les moyens pour assurer des services publics de manière plus efficace et économique.

Dans le cadre du transfert prévu par la loi NOTRe, les EPCI devaient prendre en charge l’ensemble des missions liées à l’eau et à l’assainissement sur leur territoire. Cela incluait la production et la distribution d’eau potable, la collecte et le traitement des eaux usées, ainsi que la gestion des eaux pluviales urbaines. L’objectif était de permettre une gestion plus cohérente et plus efficace de ces services à l’échelle d’un territoire plus vaste.

Selon les derniers chiffres communiqués par Intercommunalités de France, 48% des intercommunalités exercent actuellement la compétence eau potable et 56% la compétence assainissement. Environ 540 des 1.254 intercommunalités ont pris les deux compétences.
Le transfert de compétences aurait eu un impact significatif sur les EPCI, en leur confiant de nouvelles responsabilités et en augmentant leur périmètre d’action. Cela aurait nécessité une réorganisation des services, des investissements importants et une montée en compétences des équipes. Les EPCI auraient dû harmoniser les pratiques et les tarifs sur l’ensemble de leur territoire, ce qui pouvait s’avérer complexe dans certains cas.

Comment les EPCI sont-ils autorisés à gérer les compétences transférées ?

Les EPCI disposent de plusieurs modes de gestion pour exercer les compétences transférées. Ils peuvent opter pour une gestion en régie directe, où l’EPCI assure lui-même le service avec ses propres moyens, ou pour une gestion déléguée à un opérateur privé via un contrat de délégation de service public. Le choix du mode de gestion dépend des spécificités locales, des moyens disponibles et des orientations politiques des élus.

 

Décryptage du CGCT et son rôle dans ce contexte

Le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) encadre les compétences et le fonctionnement des collectivités locales. Il devra être modifié pour tenir compte de cette nouvelle orientation. Le CGCT continuera de jouer un rôle crucial dans la définition des responsabilités des communes et des EPCI en matière d’eau et d’assainissement, tout en intégrant la flexibilité annoncée par le Premier ministre.

 

Historique du processus legislatif ayant conduit à la suppression du transfert obligatoire des compétences eau

Les Sénateurs adoptent en seconde lecture le texte votés par les Députés – mise à jour du 03 avril 2025 :

Hier, 2 avril 2025, sans CMP, les Sénateurs ont adopté le texte votés plus tôt ce mois-ci par les Députés. Dans les grandes lignes, les communes qui n’ont pas encore transféré leurs compétences ne sont plus obligées de le faire tandis que les autres ne peuvent pas revenir en arrière. Nous allons remanier cet article dans les prochains jours pour vous donner une vue globale des impacts de cette loi sur le transfert de compétences en attendant la promulgation du texte.

Les Députés adoptent adoptent une version amendée du texte issus de la Commission des Lois – mise à jour du 13 mars 2025 :

Un certain nombre des modifications proposées en Commission des Lois ont été votées en séance plénière. D’autres ont été abandonnées sur le SPANC. La version étant différente de celle adoptée par le Sénat, une CMP doit être programmée dans les prochaines semaines afin d’accorder Députés et Sénateurs sur un texte commun qui sera remis au vote.

Les Députés apportent des modifications au texte du Sénat lors de la Commission des Lois – mise à jour du 11 mars 2025 :

Le 3 mars 2025, la commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi visant à mettre fin à l’obligation de transfert des compétences eau et assainissement des communes aux intercommunalités, initialement votée par le Sénat en octobre 2024. Plusieurs modifications notables ont été apportées au texte. Les députés ont réintroduit la possibilité de créer des syndicats « infracommunautaires » pour l’eau et l’assainissement, permettant ainsi de lever une incertitude juridique. Le texte prévoit également des mécanismes de solidarité territoriale en cas de pénurie d’eau, autorisant une commune en déficit à solliciter l’aide d’une commune voisine excédentaire. Par ailleurs, le dispositif de contrôle des installations d’assainissement non collectif a été largement révisé, renforçant la fréquence des contrôles pour les nouvelles installations et supprimant ceux pour les anciennes installations non conformes déjà contrôlées avant 2013. Ces modifications visent à offrir plus de flexibilité aux communes tout en assurant une gestion efficace des ressources en eau dans un contexte de dérèglement climatique. Le texte sera examiné en séance publique à partir du 11 mars avant de passer en commission mixte paritaire.

François Rebsamen favorable à la fin du transfert de compétence obligatoire – mise à jour du 29 janvier 2025 :

Alignement sur le précédent gouvernement

Interrogé le 29 janvier dernier par deux sénateurs lors de questions au gouvernement au Sénat, le Ministre a indiqué que sa position était alignée avec celle du précédent gouvernement.
« Je suis favorable à la différenciation territoriale et donc à la fin de l’obligation de transfert des compétences eau et assainissement des communes vers les EPCI (établissements publics de coopération intercommunale) », a-t-il déclaré.

Pas de retour en arrière

Le ministre a également indiqué être défavorable à « un retour en arrière » pour les communes ayant déjà transféré leurs compétences, ce qui répond à beaucoup de questions que vous nous posez via le service d’accompagnement.

Un processus législatif qui va se poursuivre dans les prochaines semaines

Le ministre souhaite son adoption « dès que possible ». « L’objectif d’une mutualisation à l’échelle infracommunautaire reste quand même un objectif serein que nous devons porter ensemble », a-t-il toutefois poursuivi, voyant dans cette mutualisation « un gage de la préservation de la ressource en eau, de la capacité à faire des investissements importants dans les années à venir et une garantie de la cohésion territoriale ».

Adoption du texte actant la fin du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement – mise à jour du 21 novembre 2024 :

Transfert du texte à l’Assemblée Nationale

Le texte adopté par le Sénat a été transféré à l’Assemblée Nationale le 18 octobre où la Commission des Lois a été saisie au fond. Le député Jean-Luc Warsmann a été nommé Rapporteur le 6 novembre dernier.

Adoption du texte par le Sénat

Le jeudi 17 octobre 2024, le Sénat a adopté la proposition de loi visant à assouplir le transfert des compétences eau et assainissement aux intercommunalités. Ce vote fait suite à l’annonce du Premier ministre Michel Barnier et concrétise la fin du transfert obligatoire prévu pour 2026. Le texte, qui a reçu un large soutien des sénateurs, maintient la possibilité pour les communes de transférer volontairement ces compétences à leur intercommunalité, tout en supprimant l’obligation légale. Cette décision législative marque un tournant significatif dans la gestion de l’eau en France, réaffirmant le principe de libre administration des collectivités territoriales. Le texte doit maintenant être examiné par l’Assemblée nationale pour poursuivre son parcours législatif.

Principales dispositions de la loi

La proposition de loi adoptée par le Sénat le 17 octobre 2024 comporte plusieurs dispositions clés concernant les compétences eau et assainissement. Tout d’abord, elle supprime l’obligation de transfert de ces compétences aux intercommunalités qui était prévue pour le 1er janvier 2026

  • Les communes n’ayant pas encore transféré ces compétences pourront désormais les conserver si elles le souhaitent. Cependant, la loi maintient les transferts déjà effectués, sans possibilité de réversibilité
  • Elle permet également aux communes de confier tout ou partie de ces compétences à des syndicats supracommunaux, offrant ainsi une flexibilité dans la gestion de l’eau
  • De plus, la loi instaure une réunion annuelle de la Commission Départementale de Coopération Intercommunale (CDCI) dédiée à l’organisation des compétences sur l’eau, avec la possibilité de formuler des propositions pour renforcer la mutualisation à l’échelle départementale
  • Enfin, elle simplifie les conditions permettant aux départements d’exercer un mandat de maîtrise d’ouvrage pour les projets de production, de transport et de stockage de l’eau

L’annonce du Premier ministre : les réactions des associations d’élus

Association des Maires de France (AMF)

L’AMF a salué cette décision, la qualifiant de « mesure de liberté et d’efficacité ». L’association estime que cette flexibilité est nécessaire pour assurer un service de l’eau efficace et de qualité, permettant aux communes et à leurs intercommunalités de « déterminer librement du transfert ou non de cette compétence en fonction des réalités locales ». L’association a publié un post sur son site internet le 14 octobre 2024 en réaction à cette annonce. Pour l’AMF, la loi vient corriger une ‘anomalie’ en mettant fin à une approche ‘descendante et uniforme’. Elle conseille aux élus de profiter de cette flexibilité pour réaliser un diagnostic précis de leurs services avant de décider de l’échelle de gestion la plus pertinente.

Intercommunalités de France

En revanche, Sébastien Martin, président d’Intercommunalités de France, a exprimé son mécontentement face à cette décision. Il a déclaré : « J’ai rarement vu un tel niveau de mépris à l’encontre des intercommunalités ». M. Martin a souligné l’importance de la solidarité intercommunale face aux défis d’investissement dans le secteur de l’eau et de l’assainissement.Nous mettrons à jour cet article au fur et à mesure que nous identifierons des réactions complémentaires. L’association met surtout en garde contre l’extrême complexité juridique des nouvelles conventions de délégation et le risque d’une gestion fragmentée, qui nuirait à la solidarité financière entre communes et à une planification cohérente de la ressource en eau.

Annonce initiale du Premier Ministre Michel Barnier le 9 octobre 2024

Le Premier Ministre Michel Barnier a fait une annonce majeure ce mercredi 9 octobre au Sénat concernant le transfert des compétences eau et assainissement aux intercommunalités. Cette déclaration marque un tournant significatif dans la gestion de l’eau en France et suscite de nombreuses réactions dans le secteur.

La loi NOTRe et le rôle des collectivités territoriales

La loi NOTRe (Nouvelle Organisation Territoriale de la République) de 2015 avait initialement prévu le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et d’agglomération au 1er janvier 2020. Face aux difficultés rencontrées par certaines collectivités, la loi du 3 août 2018 a introduit un mécanisme de report au 1er janvier 2026, sous certaines conditions. Ce transfert visait à rationaliser la gestion de l’eau et de l’assainissement en France, en mutualisant les moyens et les compétences au niveau intercommunal. Les collectivités territoriales jouent un rôle crucial dans la gestion de l’eau et de l’assainissement en France. Elles sont responsables de l’approvisionnement en eau potable, de la collecte et du traitement des eaux usées, ainsi que de la gestion des eaux pluviales. Ces missions essentielles nécessitent des investissements importants et une expertise technique pointue, ce qui justifiait, selon les partisans de la loi NOTRe, le transfert de ces compétences à l’échelon intercommunal.

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Cet article a été écrit par Romain Delfosse

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