De l’intelligence artificielle pour mieux gérer la ressource en eau sur le département de la Manche (50).

Comment ce projet s’est-il imposé à l’agenda du SDeau50 ?

Louison Marie : M. HAMEL, Directeur Général des Services du SDeau50 a développé l’outil avec Imageau. Tout a commencé en 2018 avec un travail de conception mené avec les hydrogéologues du Pôle des Syndicats du Grand Ouest. La conception de l’outil a eu lieu en 2020, puis, la partie prédictive de l’outil (qui intègre l’intelligence artificielle) a été créée dans un second temps, en 2021.

Ce projet s’inscrit dans la compétence obligatoire du SDeau50 en matière de suivi des ressources, sur un territoire présentant une forte diversité des ressources et des pluviométries.

L’année 2022 a connu une période de sécheresse importante pour le département de la Manche, ce qui a accentué la décision de mettre en œuvre un outil permettant au SDeau50 d’anticiper l’évolution des ressources.

Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour initier ce projet ?

Jean Luchier : Lorsqu’on a commencé, il n’y avait pas de grands travaux sur cette thématique, même à l’international. Depuis le début de l’année, une thèse a été engagée pour mettre en place un partenariat avec de la recherche publique. On voit que la recherche dans le domaine de l’intelligence artificielle pour réaliser des prévisions saisonnières sur l’eau est un domaine en plein essor. De nombreux articles y font référence dans la presse spécialisée. Mais à ma connaissance, il n’y a pas d’outils de ce type développés et exploités. Au moment où nous avons démarré, en 2019-2020, le projet était novateur. Le Bureau de Recherche Géologique et Minière (organe national), travaille également ce sujet depuis. C’est une approche innovante de travailler à ces prédictions avec de l’IA, là où on a historiquement toujours travaillé avec des modèles conceptuels ou de la modélisation 3D.

Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?

Jean Luchier : L’outil de base, sur la partie prédiction, a été créé en lien avec des données publiques. Imageau est connecté à des piézomètres dont la maîtrise d’ouvrage appartient au BRGM. Des capteurs installés dans les ouvrages transmettent les données dans une base publique. Hub’eau centralise les données sur l’eau en France. A l’origine, l’outil Imageau n’utilisait pas d’instrumentation par le SDeau50 ou Imageau. Celui-ci intègre désormais les données des ouvrages du SDeau50 au fur et à mesure que le Syndicat les équipe, permettant ainsi d’avoir un suivi des niveaux dans ses propres forages.

Comment est coordonné le développement de cet outil ?

Louison Marie : Il faut cerner le besoin et l’usage du destinataire de la donnée, à qui l’outil s’adresse et qui va l’utiliser. Nous sommes beaucoup dans l’échange avec Imageau pour le développement, sur le visuel, le rendu et nos attentes. Nous leur faisons également remonter nos retours d’expérience concernant l’application : ce qui fonctionne, si les prédictions sont éloignées ou non de la réalité par rapport aux niveaux observés a posteriori…ainsi que notre connaissance du territoire.

Jean Luchier : Nous travaillons aussi avec d’autres collectivités que le SDeau50, ce qui enrichit la base de données et participe à la performance de l’outil.

Comment la collectivité a-t-elle utilisé le projet dans la communication auprès des abonnés et quelles sont les perspectives de développement ?

En 2022, le SDeau50 a mené une campagne de communication pour sensibiliser les consommateurs d’eau et notamment les touristes (utilisation de l’eau, économie d’eau, recherche de fuites,…), sur l’attention que chacun doit porter à la ressource en eau et particulièrement en période estivale où la consommation est la plus élevée alors que la ressource est au contraire dans ses niveaux bas.

Nous utilisons l’outil dans nos communications (cartes, courbes des niveaux…), notamment pour communiquer sur le suivi de l’état des ressources en période estivale. Nous travaillons avec Imageau pour intégrer des données concernant la consommation. Cela nous permettrait de croiser les données de l’état de la ressource en eau avec la consommation d’eau potable afin d’anticiper, et notamment grâce à l’outil prédictif, les périodes critiques.

Comment la collectivité a-t-elle financé ce projet et quelles ont été les aides sollicitées/obtenues ?

Louison Marie : Le logiciel a coûté 42 000 euros, et sa licence d’utilisation pour 3 ans (2022 à 2024) 42 000 euros supplémentaires, soit un total de 84 000 euros. L’Agence de l’Eau Seine-Normandie a subventionné la mise en œuvre de ce projet à 80 %. Ces montants couvrent l’ensemble de l’application dans ses différents usages et notamment le suivi des ressources.