Transfert de compétences « eau » (60) : la nécessité de la pédagogie et de la concertation
Le transfert de la compétence « eau » aux intercommunalités peut susciter des interrogations et inquiétudes chez les élus des communes concernées. Notamment quand la gestion en régie ou via DSP donnait toute satisfaction.
Dans l’Oise, la communauté de communes du Pays de Valois a pris le temps du débat et de la pédagogie au sein de la commission eau ou du conseil communautaire, mais aussi en organisant des réunions locales avec l’ensemble des élus et en prenant des engagements forts pour rassurer les communes.
Entretien avec Didier Doucet, président de la communauté de communes du Pays de Valois et maire de Lagny-le-Sec
Ce projet est présenté par :
- Didier Doucet, président de la communauté de communes du Pays de Valois et maire de Lagny-le-Sec
Didier Doucet
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment le sujet du transfert de la compétence « eau » s’est-il imposé à l’agenda de la commune de Lagny-le-Sec et à la communauté de communes ?
Il s’est imposé tout simplement comme une obligation légale à respecter avant le 1er janvier 2026 ! Mais aussi comme un enjeu intercommunal important pour assurer l’accès à l’eau et une eau de qualité. Auparavant, de nombreuses communes géraient l’eau potable seules ou en DSP, plus rarement en syndicat.
Les situations, le prix de l’eau et l’état des installations étaient assez disparates. A Lagny-le-Sec, dont je suis le maire, nous avions un syndicat qui couvrait aussi deux autres communes voisines pour un bassin de 7 000 habitants. Cela fonctionnait plutôt bien, nos installations étaient en bon état et le syndicat avait un excédent de trésorerie de 1,7M€. Aussi le transfert de compétence n’était-il pas forcément une évidence aux yeux des élus communaux ! Pour autant, nous étions bien conscients que la sécurisation de l’approvisionnement et la qualité de l’eau potable devenaient un enjeu majeur qui ne pouvait être bien traité en restant au niveau communal.
Il a donc fallu travailler pour rassurer et sécuriser l’ensemble des communes.
J’ai ainsi proposé trois mesures allant dans ce sens :
- Travail en collaboration avec les élus de terrain pour atteindre un niveau de service le plus élevé (création de commissions géographiques d’élus communaux)
- Mise en place d’un prix de l’eau différencié (pour que les communes qui ont réalisé des travaux d’investissement ne payent pas pour celles qui n’ont rien fait sciemment…)
- Fléchage pendant 6 ans des excédents transférés via la conclusion d’un pacte financier afin de prioriser les travaux sur le territoire concerné
L’harmonisation du prix de l’eau n’intervient que 10 ans après la dernière entrée d’une commune dans une DSP.
Les premiers transferts à la communauté de communes se sont faits finalement au 1er janvier 2023. Au préalable, en tant que président de l’intercommunalité, j’ai souhaité un diagnostic financier et technique.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée du projet ?
La loi ! Elle fixait la date-butoir du 1er janvier 2026 pour le transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux intercommunalités.
Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Oui elle a été réalisée à l’échelle de l’intercommunalité pour l’ensemble des communes et syndicats concernés par le transfert. Nous avons travaillé avec un cabinet extérieur pour dénombrer les installations et vérifier leur état, également pour projeter des travaux, des recettes, un emprunt d’une durée de quinze ans. Cela a pris du temps mais nous a permis d’avoir une vraie visibilité avant le transfert de compétences.
Depuis le 1er janvier 2023, nous avons déjà engagé des travaux par exemple à Lagny-le-Sec en refaisant des conduites d’eau anciennes, ainsi qu’à Eve (réfection de tout le réseau) et à Gondeville (raccordement aux puits d’une commune voisine).
Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans le projet ?
Il est primordial d’avoir un état des lieux le plus précis possible des installations existantes, de leur état, des investissements prévus, au-delà bien sûr des éléments financiers propres à chaque syndicat ou commune. Ce qui nécessite un travail en étroite collaboration avec ces collectivités de manière à partir d’une situation claire et afin de pouvoir établir un plan d’avenir.
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment votre collectivité a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
L’une des craintes était que la communauté de communes ne crée une armée mexicaine pour gérer l’eau potable et que cela n’ait un retentissement sur les factures. Nous avons donc décidé de limiter les embauches : une responsable, un technicien, une assistante et une animatrice des aires de captage – un élément essentiel pour obtenir les aides de l’Agence de l’eau.
Tous les postes, sauf celui de la responsable, sont des contrats de mission pour accompagner progressivement la prise de compétence. On y va pas à pas.
Avez-vous financé ce projet et si oui, quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?
La phase d’étude a été financée par la CCPV à hauteur de 20% et à 80%, soit 94 000 euros, par l’agence de l’eau Seine Normandie.
Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné la collectivité dans la préparation et la réalisation du projet ?
L’ingénierie-conseil et la planification technique ont été assurés par une entreprise spécialisée dans ce domaine de l’eau, IRH Ingénieur conseil, filiale d’Anteagroup.
La partie juridique a été confiée à Itinéraire Avocats spécialisée en droit public.
L’accompagnement financier a été réalisé par Partenaires Finances locales
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Le projet en détails
Dates clés
2019
2019-2021
2022
1er janvier 2023
Chiffres clés
62
57 000
À retenir
D’un point de vue communal, cela assure une sécurisation de l’alimentation en eau que nous n’avions pas. La gestion d’un réseau d’eau potable à l’échelle communale n’est plus pertinente.
Les intercommunalités doivent faire preuve de beaucoup de pédagogie et continuer à travailler main dans la main avec les communes.
Les élus communaux peuvent se sentir dépossédés d’un sujet pourtant bien traité au niveau local, qu’il s’agisse de la gestion budgétaire ou de la qualité du captage et du réseau.
Ressources
CC Pays de Valois - Arrêté portant sur le transfert de la compétence
A compter du 1er janvier 2023, le Syndicat intercommunal d'adduction d'eau de Lagny-le-Sec et Le Plessis- Belleville est maintenu pendant une période de neuf mois. Le conseil communautaire dispose de neuf mois à compter du 1er janvier 2023 pour décider de déléguer sa compétence au syndicat.