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Le changement climatique accélérateur incontrôlable des inondations en France

Cet article a été rédigé par Bruno Goupille

Crédits photos : Ecrêtement du barrage de Villerest - Etablissement public Loire

Aux yeux des experts, il ne fait plus de doute que le changement climatique est à l’origine de l’accroissement du nombre, de la fréquence et de la virulence des inondations dans notre pays et dans le monde. Les moyens de lutter contre ce phénomène apparaissent relativement limités. La prévention et l’adaptation restent les réponses les plus concrètes à ce jour.
Les faits sont têtus. En cet automne 2024, ils prennent l’allure d’une évidence : jamais les inondations en France, et dans bien d’autres pays, n’ont été aussi nombreuses, fréquentes et intenses. Le drame récent de Valence, en Espagne, en apporte une illustration terrifiante. Cet automne, sur les chaines d’informations et les réseaux sociaux, les images de villages dévastés par les brutales montées des eaux se télescopent. Certains habitants de maisons particulièrement exposées disent leur désespoir de devoir à nouveau, quelquefois pour la troisième fois consécutive, évacuer la boue de leur logement et mettre leur mobilier au rebut.

53% des départements concernés en France par les inondations

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Un rapport du Sénat, remis en septembre 2024, établit que 53 % des départements français ont été touchés par des inondations entre novembre 2023 et juin 2024, provoquant 13 décès et engendrant des dégâts de 640 millions d’euros uniquement dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais. Le rapport émis par la commission de l’aménagement du territoire pose comme une évidence le fait que le changement climatique amplifie la fréquence des inondations et des submersions marines. Il s’appuie en cela sur les conclusions du sixième rapport d’évaluation du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), publiée en mars 2023, et sur les travaux de la Cop28 de Dubaï en décembre de la même année.

Météo et impact sur le cycle de l’eau

L’augmentation de la température terrestre entraîne naturellement une augmentation des précipitations et une hausse du niveau de la mer. 80% des impacts du réchauffement climatique se traduisent directement sur le cycle de l’eau provoquant ici des inondations, là des sécheresses, et ailleurs des ouragans. Au niveau mondial, l’agence météorologique des Nations Unies a calculé qu’entre 1970 et 2021, près de 12 000 catastrophes « naturelles » ont été provoquées par des conditions météorologiques, climatiques et hydrologiques extrêmes. Elles ont provoqué des dégâts d’un montant total de 4 300 milliards de dollars.

Effet de serre

Le phénomène du réchauffement climatique est désormais bien documenté. On sait qu’il est accéléré par les émissions de gaz à effet de serre liées aux activités humaines qui y contribuent à hauteur de 1,5 °C. La présence de ces gaz dans l’atmosphère déséquilibre le bilan énergétique de la Terre, l’excès d’énergie étant absorbé par les océans dont la température, le niveau et la production de nuages augmentent irrésistiblement. Les ouragans, les submersions, les pluies diluviennes, ou le phénomène de la « goutte froide », si meurtrier en Espagne, sont la conséquence de ce déséquilibre climatique.

Pluies méditerranéennes

En France, depuis les années 1950 la fréquence des épisodes de fortes pluies a augmenté de 30%. Tendance confirmée par le Bureau de Recherche Géologique et Minière (BRGM) qui relève que le pays a connu près de 300 inondations significatives entre 2000 et 2020, et que ce chiffre est en constante augmentation.

Face à un réchauffement climatique de plus en plus difficile à maîtriser, les risques s’accroissent d’autant. Selon les climatologues, il est probable que vont se renouveler les phénomènes de « pluies méditerranéennes » qui ont frappés le département de l’Aude en 2018 causant la mort de 15 personnes et des dégâts estimés à plus de 200 millions d’euros.

Risque accru à Paris

De la même manière, si le réchauffement climatique augmente encore de 2 degrés, le laboratoire de météorologie dynamique (LMD) estime que le risque d’une montée des eaux de la Seine, supérieure à celle de janvier 2016 qui avait touché Paris, pourrait doubler d’ici 2050.

Les prévisions des assureurs ne sont guère plus optimistes. Ils estiment que les inondations constituent le premier risque naturel en France en raison des 16 000 communes riveraines d’un cours d’eau. Selon France Assureurs, la sinistralité « inondations » devrait progresser de 30% sur la période 2020-2050 avec un coût de 50 milliards d’euros, en progression de 81%. L’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) confirme cette orientation en estimant que le coût des inondations pourrait atteindre 1,5 milliard d’euros par an d’ici 2050, si aucune mesure d’adaptation n’est mise en place.

Prévention et adaptation

Précisément, est-il encore possible d’inverser cette tendance angoissante ? Dans quelle mesure les décisions de la Cop28 et les recommandations du Giec parviendront-elles à faire réduire de façon significative la production mondiale de gaz à effets de serre ? Face à l’impossibilité de répondre raisonnablement à ces questions et au caractère quasi inéluctable des tendances observées, restent les mesures de prévention et d’adaptation pouvant être déployées.

Le rapport du Sénat préconise un certain nombre de dispositions comme l’amélioration de la gestion des cours d’eau par une meilleure utilisation de la compétence Gemapi, ou l’adaptation des politiques d’urbanisme tenant compte du risque inondation.

Programme Gov4Water

L’agence de l’eau Loire-Bretagne énumère également des conseils d’adaptation au changement climatique comme la gestion collective de la ressource en eau, la préservation des milieux aquatiques et des zones humides, ou les solutions d’infiltration de l’eau sur place.

Avec six autres pays européens, l’agence de l’eau Loire-Bretagne s’est inscrite dans le projet Gov4Water « pour une gestion efficace et adaptative des ressources en eau répondant aux enjeux climatiques ». Ce programme vise à formuler des préconisations pour une meilleure intégration des enjeux climatiques dans la gestion de l’eau. Les partenaires s’engagent à partager leurs données et travailler sur les mesures à prendre pour se préparer au manque d’eau et aux inondations.

Le projet Gov4Water est financé par l’union européenne dans le cadre d’une coopération interrégionale. Il s’étend d’avril 2024 à juin 2028 et est estimé à 1 834 280 €.

Solutions fondées sur la nature

Plus prosaïquement, l’agence de l’eau Loire-Bretagne a mis au point un dispositif de « solutions fondées sur la nature » pour s’adapter au changement climatique. Reposant sur le bon sens et les pratiques traditionnelles, ces solutions favorisent le ralentissement des écoulements dans les rivières, l’infiltration et la rétention d’eau. Elles constituent des solutions fiables et pérennes et permettent également de répondre à d’autres enjeux comme l’épuration des eaux et la préservation de la biodiversité.

Au titre de ces mesures figure la végétalisation en milieu urbain qui favorise l’infiltration des eaux pluviales, la biodiversité et le rafraîchissement de la ville.

Qui plus est, les solutions préconisées s’appuient sur des éléments naturels avec des coûts d’investissements et d’exploitation plus faibles et qualitatifs que la création d’infrastructures artificielles.

Echéances lointaines

Malgré tous ces efforts, l’inversion de la tendance climatique sera difficile, voire impossible à obtenir rapidement. Il a fallu quinze mille ans pour que la température mondiale augmente de 5 degrés après la dernière ère glaciaire, alors que seulement deux siècles de pollution humaine parviendront au même résultat. Le chemin inverse ne se fera pas au même rythme. Même en réduisant drastiquement la production des gaz à effet de serre, le bénéfice ne pourra s’en faire ressentir qu’à des échéances très lointaines. Le temps que notre Terre digère, peut-être, l’inconséquence des hommes.

Cet article vous est proposé par aquagir

aquagir est un collectif d’acteurs œuvrant dans l’accompagnement de bout-en-bout des projets de gestion des eaux dans les territoires avec une vision globale, collective et écosystémique des enjeux et des solutions.  aquagir regroupe l’ANEB, la Banque des Territoires, le BRGM, le Cercle Français de l’eau, les pôles de compétitivité de la filière eau Aqua-Valley et Aquanova et l’UIE (Union des Industries et Entreprises de l’Eau)

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Cet article a été écrit par Maxime Blondeau

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