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Serra di Ferro (2A), un modèle unique de tarification estivale de l’eau potable

Serra di Ferro, commune à l’habitat dispersé, depuis les hameaux de moyenne montagne à la station du littoral, a mis en place une tarification estivale de l’eau potable unique en Corse, favorable à ceux qui vivent à l’année au village. Elle repose sur un principe simple : ceux qui consomment beaucoup, en particulier pendant les quatre mois de la saison touristique, paient plus.

Entretien avec Jean Alfonsi, maire de la commune de Serra di Ferro et Vice-Président de l’association des maires et présidents d’EPCI de la Corse-du-Sud

Parole de collectivité
Jean Alfonsi, maire de Serra di Ferro - Crédits photo : Banque des Territoires
Distribution de l’eau

Ce projet est présenté par:

  • Jean ALFONSI, maire de la commune de Serra di Ferro & Vice-Président de l’association des maires et présidents d’EPCI de la Corse-du-Sud.
Il s’agit d’éviter de faire peser sur nos administrés qui vivent ici à l’année, le poids de surcoûts dans nos investissements et dans l’entretien des équipements, liés notamment à la forte pression démographique pendant la saison estivale

Jean ALFONSI

Parole de collectivité

Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action

La population de Serra di Ferro, 650 habitants à l’année, est multipliée par 10 en période estivale. Pendant quatre mois, de juin à septembre, la commune consomme autant d’eau potable que pendant les huit autres mois. Une tarification estivale  et sociale, à bien des égards  de l’eau potable a été mise en place avec la généralisation des compteurs en télérelevé. Elle se base sur deux périodes fixes pour la relève des consommations des 700 abonnés de la commune, l’une estivale (1er juin au 30 septembre), l’autre dite d’hiver dans l’intervalle. L’abonnement type pour un ménage de trois personnes est de 120 m3 par an, équitablement répartis entre été et hiver. Les 60 premiers m3 sont payés, même s’ils ne sont pas consommés pour les deux périodes. Au-delà – plus de 60 m3, plus de 500 m, le prix du m3 franchit des tranches supérieures. Il peut alors varier du simple au double, entre la facturation estivale et d’hiver.

Le même modèle est appliqué à l’assainissement. L’instauration de la tarification estivale qui pèse sur les gros consommateurs, les activités liées au tourisme, et les résidences secondaires (plus de 65 % de l’habitat du village), a accompagné un vaste programme de réhabilitation du réseau et de changement de la ressource.

Comment la mise en œuvre d’une tarification estivale sur le réseau d’adduction d’eau potable de Serra di Ferro s’est-elle imposée à l’agenda de la commune ?

La question s’est posée au moment du renouvellement de l’affermage, une délégation de service public reconsidérée tous les douze ans. Sur la base des schémas directeurs d’alimentation en eau potable et de traitement des eaux usées établis en 2015 et 2016, nous savions que la commune qui passe de 650 habitants l’hiver à 7 000 l’été, aurait de gros chantiers à engager. Il s’agissait pour nous d’éviter de faire peser sur nos administrés qui vivent ici à l’année, le poids de surcoûts dans nos investissements et dans l’entretien des équipements, liés notamment à la forte pression démographique pendant la saison et au tourisme dans la région. La mise en place d’une tarification estivale a été rendue possible par la pose de compteurs numériques qui permettent cette télérelève de la consommation. Elle s’effectue au 1er juin et au 30 septembre. Ce sont les deux bornes d’une tarification, que l’on pourrait qualifier d’hiver (8 mois) et d’été (4 mois), dans ces intervalles.

Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?

C’est à ma connaissance une idée originale et qui, je le redis, repose sur la généralisation des compteurs numériques sur le territoire de la commune. À tout moment, même si nous avons choisi d’opérer deux relevés à dates fixes, nous sommes en mesure de collecter des données de consommation, ce qui représente un intérêt pour le fermier et pour l’usager, qui peuvent ainsi agir sur des surconsommations, des fuites ou des évènements sur le réseau.

Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet de tarification, mais aussi sur la rénovation des réseaux, la chasse aux fuyards, la réhabilitation des châteaux d’eau, le changement de ressource ?

Il faut replacer le sujet de la mise en place de la tarification estivale de la consommation d’eau potable dans un contexte plus large.

Serra di Ferro présente plusieurs spécificités : un territoire de moyenne montagne qui va jusqu’au littoral, un habitat très dispersé composé de cinq hameaux, eux-mêmes subdivisés, dont une station balnéaire, Porto Pollo ; une population qui, de 647 habitants à l’année, connaît des pics à 7 000 habitants en période estivale.

La commune a ainsi établi des schémas directeurs pour l’eau potable et l’assainissement. Ces documents définissent depuis nos politiques publiques. Les suivre est l’assurance pour nous d’obtenir des financements pour nos investissements de la part de l’Agence de l’eau, et de la Collectivité de Corse.

Notre finalité est de garantir un service d’eau potable de qualité pour nos administrés, tout en veillant à en faire baisser le prix, car l’eau reste chère et précieuse. Et de rejeter, après traitement des eaux usées, une eau de qualité dans un environnement sensible et fragile : embouchure du fleuve Taravu, étang de Tanchiccia, plaine agricole.

Depuis plus de dix ans, méthodiquement, nous avons déployé des actions dans ce but. Par des interventions sur le réseau fuyard, le linéaire défectueux a été renouvelé. Par le changement de la ressource qui s’est déroulé en deux phases après un épisode de grande turbidité de l’eau prélevée jusque-là dans le Taravu, une eau brute qui était très lourdement traitée ; depuis juin 2024, grâce à deux forages réalisés sur le territoire de la commune, et par le captage d’une eau de source pour le hameau de Tassinca, Serra di Ferro assure son approvisionnement. L’opération est passée par la réhabilitation des 6 châteaux d’eau, au départ desquels nous piloterons bientôt plus finement l’adjonction de chlore dans le réseau.

Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?

Nous avons été assistés par un bureau d’études, le renouvellement de l’affermage s’inscrivant dans le cadre d’un marché public. Il nous a conduit à écarter la piste de la gestion de l’eau par une régie municipale, en raison de contraintes fortes sur le personnel à mobiliser notamment en période estivale.

Le bureau d’études nous a permis de quantifier notre fonctionnement, ce qui, en aval, nous a aidé à ajuster le prix de l’eau potable au m3 selon la saisonnalité et les seuils de volumes consommés, à trancher la question du prix des abonnements et leur répartition. Celui-ci est calculé sur la base d’une famille de trois personnes. Pour un hôtel, par exemple, nous rajoutons un abonnement toutes les 10 chambres. Pour un camping, un abonnement toutes les 20 places. En fait, en surmultipliant comme ça les abonnements, on a réussi à faire baisser le coût de l’abonnement du particulier.

Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?

En démontrant que, même si l’eau reste chère, la facture se situe 20% en dessous de ce qu’elle aurait dû être, pour ceux qui vivent à l’année à Serra di Ferro. Ceux qui peuvent se plaindre de la tarification estivale, et ils ne sont pas légion à le faire, sont ceux qui viennent uniquement l’été, qui possèdent une résidence secondaire dans les hameaux ou sur le littoral, et qui se disent : « Moi j’ai une facture qui est quand même importante l’hiver et, pourtant, je suis absent ».

Je leur réponds que nous appliquons ce que la loi nous permet : avoir un prix d’abonnement constant, et un prix du m3 constant. Même si le prix du m3 facturé reste très bas l’hiver, les gens qui ne viennent que l’été ont la sensation de surpayer. C’est l’effort que nous leur demandons, car les surinvestissements – plus de 50 km de réseau à entretenir – sont liés à la période estivale.

Comment la collectivité a-t-elle financé le projet, et quelles sont les aides sollicitées et obtenues ?

Par une répartition très classique des aides à l’investissement qui tient à l’existence des deux schémas directeurs : 70% pour l’Agence de l’eau, 20 % pour la Collectivité de Corse, 10 % en autofinancement, grâce à la surtaxe qui est reversée à la commune par le fermier, Kyrnolia, quelques centimes rétrocédés sur chaque facture et qui représentent 40 000 € sur la fourniture d’eau potable ; 40 000 € sur l’assainissement des eaux usées.

Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné la commune de Serra di Ferro dans la préparation et la réalisation de l’ensemble des projets ?

Pour la rédaction de notre schéma directeur d’assainissement, le département de Corse-du-Sud à l’époque, a été un vrai soutien. La Collectivité de Corse a pris le relais, techniquement.

Les bureaux d’études nous ont accompagnés tout au long des procédures. L’État, à travers notamment l’Agence régionale de Santé, nous a assisté pour le changement de ressource et la garantie d’une eau de qualité.

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Banque des territoires - Groupe Caisse des dépôts

Le projet en détails

Dates clés

2015

Réalisation du schéma directeur d’alimentation en eau potable

2017

Mise en place de la télérelève et de la tarification estivale de l’eau potable

2021

Réhabilitation des six châteaux d’eau de la commune

2024

Finalisation du changement de ressource avec l’équipement des forages

Chiffres clés

150 000

m3 de consommation annuelle en eau potable pour la commune

80 000

m3 de consommation d'eau potable sur les 4 mois de saison estivale

1 584 696

€ (HT), Coût du chantier sur l'intervention du réseau fuyards

34,2

Km de réseau d’alimentation/distribution d’eau potable

À retenir

Une baisse sur la facture moyenne (- 20%) pour un administré qui est là à l'année.

Une maîtrise de la consommation et une eau de qualité

Une eau qui reste chère (2,19 € le m3 en moyenne), surtout quand on surconsomme et qu’on ne fait pas attention.

Un effort réparti équitablement, les gros consommateurs paient plus que les petits.

Les partenaires de ce projet

Agence de l'eau Rhône-méditerranée-corse

Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse

Collectivité de Corse

Collectivité de Corse

Les-agences-regionales-de-sante-ARS_

Agence Régionale de Santé

Les acteurs de la filière eau impliqués dans ce projet

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Nombre d'habitants

650

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