Lac d’Enghien-les-Bains (95) : restaurer un écosystème pour lutter contre les cyanobactéries
Le lac d’Enghien-les-Bains, confronté à une prolifération de cyanobactéries, fait l’objet d’un vaste programme de restauration porté par le SIARE (Syndicat Intégré Assainissement et Rivière de la région d’Enghien-les-Bains) . Ce projet inclut la renaturation écologique des berges et des actions contre les pollutions diffuses. Cette initiative s’attaque aux causes structurelles des déséquilibres aquatiques.
Avec 33 opérations planifiées sur 15 ans, dont 10 prioritaires, le programme vise à améliorer la qualité de l’eau, restaurer les écosystèmes et prévenir les inondations, tout en valorisant un site classé patrimoine remarquable.





Entretien avec Jean-Pierre ENJALBERT, Murielle VANNIER et Laëtitia PELLETIER

Ce projet est présenté par :
- Jean-Pierre ENJALBERT, Président du Syndicat intégré assainissement et rivière de la région d’Enghien-les-Bains (SIARE)
- Murielle VANNIER, directrice générale des services du SIARE
- Laëtitia PELLETIER, directrice du service Environnement et milieux aquatiques du SIARE
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment la lutte contre le phénomène de cyanobactéries au lac d’Enghien-les-Bains s’est-elle imposée à l’agenda du Syndicat intégré assainissement et rivière de la région d’Enghien-les-Bains (SIARE) ?
Le développement des cyanobactéries, des organismes microscopiques proches des algues qui se développent dans les milieux aquatiques, est un problème multifactoriel, amplifié par le réchauffement climatique, la stagnation de l’eau et la faible profondeur du lac (1,3 mètres en moyenne). Ces conditions favorisent la montée en température de l’eau, son évaporation et la diminution de son oxygène, créant un terrain idéal pour leur prolifération.
Deux événements majeurs ont agi comme déclencheurs : d’abord, les inondations de 2016 et 2018, qui ont touché le bassin versant et révélé la nécessité d’une gestion intégrée des eaux. Ensuite, l’été 2020 a marqué un pic de crise environnementale avec une mortalité piscicole de 12,5 tonnes de poissons en quatre jours. Ces épisodes ont mis en lumière les défis posés par la qualité de l’eau et les pollutions diffuses, notamment celles liées aux erreurs de branchement des eaux usées sur les réseaux pluviaux.
En réponse, le SIARE a lancé un Plan Pluriannuel de Restauration (PPR) visant à améliorer la qualité de l’eau, restaurer les milieux aquatiques et prévenir de futures crises.
Ce projet structurant incarne notre engagement pour un modèle de gestion de l’eau durable et adapté aux défis climatiques.
Quelles solutions ont été mises en place ?
Pour combattre les cyanobactéries et améliorer la qualité de l’eau, plusieurs actions ont été menées. Nous avons réaménagé le site des Cressonnières à Saint-Gratien, qui alimente 70 % des eaux du lac, avec un dispositif de by-pass utilisé pour gérer les pollutions accidentelles en amont, afin que l’eau contaminée ne se déverse pas dans le lac, limitant ainsi les risques pour la qualité de l’eau et les écosystèmes. Des zones d’aération stratégiques ont également été créées pour fournir des îlots d’oxygène aux poissons et limiter les effets des canicules.
Le PPR, qui prévoit 33 opérations sur 15 ans, a structuré nos interventions, notamment la renaturation des berges du lac. Actuellement, 90 % des berges sont bétonnées, limitant la phytoépuration et la biodiversité. Leur réaménagement avec une ripisylve, une zone plus ou moins large en bordure du lac où pousse un ensemble d’espèces végétales, permettra une meilleure autoépuration de l’eau, un ombrage naturel et une stabilisation des berges. À venir, la restauration de zones humides et la correction des erreurs de branchement des eaux usées figurent parmi nos priorités.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
Nous nous sommes appuyés sur des exemples de gestion écologique réalisés par nos partenaires (les collectivités, les communes…). La renaturation des berges, par exemple, est une méthode éprouvée pour restaurer les fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques. Cependant, chaque contexte est unique, et notre projet a nécessité des ajustements empiriques pour répondre aux spécificités du milieu. La GEMAPI (Gestion des Milieux Aquatiques et Prévention des Inondations) implique de travailler avec des environnements complexes où les solutions doivent souvent être adaptées au fil des phases de mise en œuvre.
Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Oui, chaque étape du projet a été précédée d’études approfondies. Le diagnostic initial du bassin versant a permis de cartographier les problématiques et de prioriser les interventions. Des études complémentaires ont précisé les dimensions techniques et réglementaires, notamment les dossiers soumis à la loi sur l’eau et les ajustements des documents d’urbanisme. Ces démarches, bien que longues (parfois plus de neuf mois), garantissent que nos actions respectent les cadres environnementaux et s’intègrent dans une vision globale. Pour le réaménagement des berges et la restauration des zones humides, des modélisations ont été réalisées pour évaluer l’impact écologique des travaux, notamment sur la biodiversité et la capacité de rétention des eaux pluviales. Ces études, associées à des campagnes régulières de mesure de la qualité de l’eau, assurent la cohérence et l’efficacité du programme.
Concernant les compétences, quelles sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?
Le succès de ce projet repose sur une expertise pluridisciplinaire. Les ingénieurs du SIARE, spécialisés en hydraulique, géologie et écologie, ont conduit les études initiales et supervisé les travaux. Nous avons également collaboré avec des prestataires externes, comme des hydrogéologues et des écologues, pour affiner les scénarios d’intervention. La gestion administrative et réglementaire a mobilisé des compétences spécifiques, notamment pour élaborer les dossiers conformes à la loi sur l’eau et coordonner les acteurs institutionnels. Enfin, la planification financière a nécessité une analyse détaillée pour maximiser les subventions et optimiser l’usage de la taxe GEMAPI.
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment avez-vous assuré le bon dimensionnement du projet ?
Nous avons adopté une approche globale à l’échelle du bassin hydrographique, intégrant des critères techniques, écologiques et financiers. La maîtrise foncière a été un facteur clé : elle garantit que les terrains nécessaires aux aménagements sont disponibles. Chaque étape a été planifiée pour s’intégrer dans une progression logique et durable, en veillant à ce que les moyens financiers soient mobilisés de manière optimale. Des simulations ont permis de tester la faisabilité des interventions, notamment pour le réaménagement des berges et la création de zones humides.
Comment le projet a-t-il été financé et quelles aides ont été sollicitées ?
Le SIARE finance l’ensemble des opérations, principalement à partir de la taxe GEMAPI, instaurée pour répondre aux besoins de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. Parallèlement, des aides ont été obtenues de nos partenaires que sont l’Agence de l’Eau Seine-Normandie et le département du Val-d’Oise (CD95).
Quels sont les autres acteurs qui vous ont accompagné dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
Une multitude d’intervenants : nos prestataires et les institutionnels (les services de l’État, les communes, les EPCI).
Profitez d’une offre de financement des projets en faveur de l’environnement : gestion de l’eau, etc.

Le projet en détails
Dates clés
2018
2019
2025
Chiffres clés
33
31 000
41 000
À retenir
Structuration de l’action à travers le PPR du bassin versant du ru d’Enghien : ce plan pluriannuel offre une feuille de route claire et cohérente pour restaurer le lac et son environnement, tout en répondant aux enjeux écologiques, hydrologiques et urbains.
Cohérence d’action grâce à la maîtrise foncière : en sécurisant les terrains nécessaires aux interventions, nous avons pu garantir la faisabilité et l’efficacité des projets à long terme.
Délais de mise en œuvre : bien que nécessaires pour des études approfondies et des autorisations réglementaires, ces délais sont perçus comme trop longs par les élus et les citoyens. A cela, je rajouterai deux difficultés : les démarches administratives chronophages et les difficultés liées à la maîtrise foncière.
Les partenaires de ce projet

Agence de l’eau Seine-Normandie

Département du Val d'Oise
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Données de contact
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