Thionville (57) – Végétalisation de la cour d’école Poincaré ou comment faire entrer la nature dans la cour de récré
Située au cœur de la ville de Thionville (57), dans le périmètre du programme Action Cœur de Ville, l’école Poincaré a fait entrer la nature dans la cour de récréation. Le bitume est remplacé par des matériaux drainants, place aux noues colorées, aux jeux, aux fleurs et aux arbres. Entièrement désimperméabilisés et végétalisés, les 3 800 m2 de cour sont devenus un îlot de fraîcheur très apprécié des élèves et de l’équipe pédagogique. Ce projet innovant, porté par l’équipe municipale depuis 2021, a été l’amorce d’une aventure qui se poursuit au rythme de deux rénovations de cour d’école par an. Exceptionnel de par sa taille (3 800 m2) et sa méthodologie de concertation, le lieu sert d’espace test et d’observatoire pour les rénovations futures. Le chantier d’un coût de 400 000€ HT a bénéficié de 80% d’aides et de subventions sur le montant hors taxe des travaux de désimperméabilisation et de végétalisation.
Entretien avec Patricia Renaux et Aurélie Debrin
Ce projet est porté par:
- Patricia Renaux, Adjointe, déléguée à la Transition Écologique et au Cadre de Vie, et Vice-Présidente CA Portes de France-Thionville
- Aurélie Debrin, directrice de projets, chargée des projets de transition écologique à la ville de Thionville.
Patricia Renaux
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment le sujet s’est-il imposé à l’agenda de votre collectivité ?
Dès 2014, lors de notre premier mandat, nous avions établi un programme de lutte contre le réchauffement climatique et un des axes forts de ce programme porte sur le retour de la nature en ville. Nous avons depuis réalisé un certain nombre d’actions dans l’hypercentre telles qu’un jardin éphémère, une microforêt, les permis de végétaliser pour les habitants, le reboisement en ville ou encore la gestion différenciée de nos espaces verts.
Avec ses 3800 m2 de cour bitumée, la végétalisation et la désimperméabilisation, la cour de l’école Poincaré était un vrai challenge. Bien qu’il y ait eu des esquisses préalables, c’est un projet exemplaire qui nous a permis de tester la méthode de concertation, le réemploi de l’eau pour les plantes et la déconnexion des gouttières de l’école. De plus, nous avons repensé entièrement les usages de la cour pour les diversifier et les rééquilibrer. Cette expérience a été une amorce et un test, dont nous nous servons pour restaurer deux cours d’école par an.
Sur ce programme, 70 arbres ont été plantés pour faire de l’ombrage sur le bâtiment et rafraîchir les classes pourvues de grandes baies vitrées. De plus, nous avons eu la chance de pouvoir conserver les tilleuls majestueux.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
Nous nous sommes inspirés principalement des cours Oasis de Paris, c’étaient les précurseurs. Il y a eu aussi une initiative du département pour accompagner certaines communes, mais aucun projet de proximité avec une pareille ambition. La taille de notre cour est exceptionnelle, les expériences que nous avons pu voir portaient à peine sur la moitié. Aujourd’hui, c’est nous qui servons d’exemple.
Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Le bureau d’études Vizea, a réalisé dans un premier temps un diagnostic complet pour mettre en lumière les enjeux prioritaires du réaménagement et nous a accompagnés dans la concertation.
Puis, l’étude de faisabilité a été réalisée en interne par le bureau d’étude de la ville. Des recherches scientifiques ont été effectuées, le sol a été sondé à plusieurs endroits pour regarder la perméabilité, choisir les matériaux et dimensionner les noues correctement. C’est pour cette raison que nous étions très attentifs cette année, en effet, la surface doit être juste pour ne pas avoir de zones inondées dans l’école. Nous avons expérimenté des matériaux drainants pour la surface de sport, les copeaux pour les jeux, le cheminement, c’était un projet test tant sur la concertation que sur la partie technique. Par exemple, nous nous sommes rendu compte qu’il valait mieux encadrer les végétaux avec des petites cordelettes ou des ganivelles. Même si au départ, lors de la plantation collective, les enfants étaient très attentifs aux plantes, leur nature est telle qu’ils ne regardent pas toujours où ils mettent les pieds quand ils courent.
Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?
En premier lieu, la maîtrise des espaces verts et des paysages est indispensable. Le service Etudes et Travaux d’Aménagement Urbain dispose de la compétence sur les matériaux. Ils ont testé les matériaux drainants, les cheminements et puis l’aspect paysage, avec le choix des végétaux au bon endroit.
Pour la concertation, je dirai qu’il faut de la pédagogie. Même si sur ce projet elle s’est très bien passée, c’est vraiment fluctuant en fonction de l’histoire de l’école, de la sensibilité de l’équipe. La méthode est toujours la même, mais le dialogue peut être très différent d’une structure à l’autre.
Je pense aussi que la maîtrise des budgets est une compétence indispensable sur ce type de projet parce que les aides sont de l’argent public. Nous avons dû faire des choix sur les matériaux et réduire les cheminements, les tableaux d’écritures, la boîte à livres ont été récupérés ou construits dans les services.
Sur la cour Poincaré, nous étions entre 90 et 100 € du mètre carré, ce qui reste très raisonnable par rapport aux références (120 à 130 € le mètre carré).
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
C’était essentiel pour nous de co-construire ce projet avec les enfants, les parents et l’équipe pédagogique. Les instituteurs et la directrice ont tout de suite été partants, ils se sont occupés des échanges avec les élèves.
Le bureau d’étude Vizea nous a proposé une méthode de concertation innovante. Des groupes de travail ont été établis entre parents et équipe pédagogique. Chacun disposait d’un plan de base avec des découpages de zones et des cartes à points/étoiles qui représentaient un porte-monnaie virtuel, histoire de ne pas dépasser le budget prédéfini par la commune. Ils avaient droit à 20 étoiles pour choisir l’ensemble des équipements qu’ils pensaient prioritaires.
Certains axes étaient imposés tels que faire intégrer la nature, un plateau sportif et des zones de repos, d’expression et de jeux. Plusieurs scénarios ont été construits puis soumis à un consensus pour satisfaire tout le monde. La plupart des demandes faites par les enfants ont trouvé place dans la cour hormis les animaux domestiques.
Côté communication, nous avons tenu un stand le jour de la kermesse et lors de la mise en place de la phase des travaux, nous avons réalisé des flyers pour prévenir les parents des modifications. Les travaux ont été terminés 1 mois avant la fin de l’année scolaire, les élèves de CM2, qui avaient beaucoup participé au projet, ont été ravis de pouvoir profiter un peu de ce nouvel espace. À la rentrée prochaine, nous avons prévu d’auditer les enseignants, les parents et les enfants pour qu’ils nous donnent leurs ressentis et comprendre comment ils se sont approprié l’espace.
Comment la commune de Thionville a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?
Le projet a coûté près de 400 000 € TTC ce qui représente entre 90 à 100 € du m2.
Dans le cadre du programme Action cœur de ville, nous avons été accompagnés par le bureau d’études Vizea, dans le cadre de la démarche SGREEN initiée par la Banque des Territoires. Par ce biais, la Banque des Territoires a pris en charge la totalité de l’étude de Vizea pour la mise en place de la concertation et la communication autour de celle-ci.
Pour la végétalisation et la désimperméabilisation le budget était de 270 000 €. Celui-ci a été subventionné à 80 % par l’agence de l’eau Rhin-Meuse dans le cadre du contrat de territoire “Eau et Climat”. Tout le reste, soit le mobilier, les jeux et la partie génie civil, a été financé par la commune (130 000 €).
Quels sont les autres acteurs qui vous ont accompagné dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
Nous avons bien sûr consulté les espaces verts, les personnels de maintenance et certains ateliers de la ville ont participé à ce grand projet. Les peintres sont venus nous aider pour la boîte à livre, les menuisiers ont remis en état le chalet qui sert pour les outils du jardin… Beaucoup de services sont intervenus et ont collaboré.
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Le projet en détails
Dates clés
2021
janvier 2022
mai 2022
automne 2022 - mai 2023
Chiffres clés
400 000
4 000
1 150
Résultats
- Le bruit a complètement changé, il y a beaucoup moins de résonance. Les filles et les garçons, ensemble, peuvent courir, sauter, grimper, découvrir, percevoir et s'amuser.
À retenir
L'objectif premier était de créer un îlot de verdure, un îlot de fraîcheur en cœur de ville.
Ce projet offre la possibilité aux enfants et aux enseignants de s’acclimater au réchauffement climatique futur.
Dans la cour il y a environ 30 essences d’arbres de nombreuses variétés dans les massifs, des insectes, apprendre avec cet environnement va les inciter à mieux le comprendre et à mieux le respecter.
Ressources
Banque des Territoires - Cour d’école végétalisée, Poincaré à Thionville (57)
La commune de Thionville s’est lancée dans le réaménagement de la cour d’école Poincaré. L’objectif : désimperméabiliser 4 000 m² de bitume, végétaliser l’espace et repenser les usages dans la cour pour les diversifier et les rééquilibrer.
Le Républicain Lorrain - Poincaré, première école à faire entrer la nature dans la cour de récréation
Terminé, le plateau de bitume austère, froid en hiver et intenable en été. À l’avenir, la cour de l’école Poincaré sera végétalisée et dotée de plusieurs espaces différenciés où les enfants pourront s’amuser, se reposer, lire et même se cacher. Les travaux sont engagés.