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Derrière la dune, une digue pour protéger les terres en baie d’Authie (62)

Dans le Pas-de-Calais, la Communauté d’Agglomération des Deux Baies en Montreuillois (CA2BM) a mis en place une double protection pour réduire les risques de submersion marine. Le rechargement du cordon dunaire s’est accompagné de la construction en 2022 d’une digue rétro-littorale. Cet ouvrage doit protéger les terres en cas de brèche dans le cordon dunaire. 8 000 à 12 000 personnes seraient touchées par une submersion.

La baie d’Authie est confrontée au recul de son trait de côte. Ce projet de 2,8M€ s’inscrit dans le PAPI (Programme d’actions de prévention des inondations) Bresle Somme Authie. Il a été financé par l’Etat (40%), le FEDER (40%) et la CA2BM (20%).

Entretien avec Claude Vilcot, vice-président GEMAPI Mer de la communauté d'agglomération CA2BM

Parole de collectivité
Claude Vilcot - Crédits photo : Banque des Territoires
Gestion des milieux aquatiques

Le projet est porté par :

  • Claude Vilcot est vice-président GEMAPI Mer de la communauté d’agglomération CA2BM ainsi que maire de Groffliers (62).

Parole de collectivité

Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action

Comment le sujet de la création de la digue dans la baie d’Authie s’est-il imposé à l’agenda de votre collectivité ?

Dès 2009, la Communauté de communes Opale Sud, devenue par la suite Communauté d’agglomération des Deux Baies en Montreuillois (CA2BM), s’est saisie des compétences “défense contre la mer” et “lutte contre l’érosion”. A l’époque, ces sujets étaient très peu connus et j’avais parfois l’impression que nous étions les seuls concernés !

En baie d’Authie, nous sommes confrontés à un net recul du trait de côte attaqué par les vents et marées. Cela se cumule avec l’érosion créée par les évolutions de l’Authie, un fleuve qui n’est pas canalisé et méandre librement. Notre baie, qui forme une frontière naturelle entre la Somme et le Pas-de-Calais, est l’une des dernières baies totalement naturelles de France. Au sud de cette baie, les sédiments s’accumulent (accrétion). Sur la rive nord, où nous nous situons, la dune recule. Cette érosion continue fait craindre le risque d’une submersion marine et l’inondation des communes situées juste derrière, car le cordon dunaire constitue le seul rempart.

Nous avons donc décidé de renforcer le cordon dunaire en y déposant 275 000 m3 de sable en 2020. Et derrière celui-ci, nous avons construit en 2022 une digue dite rétro-littorale, qui protégerait les terres en cas de brèche dans la dune. Elle a été construite dans le secteur dit du Bois des Sapins, un lieu emblématique puisque les arbres se couchaient en pied de dune lors de chaque forte marée. Si une submersion avait lieu sur notre linéaire de la Baie d’Authie, plus de 8 000 résidents (et 12 000 en été), seraient touchés.

 

Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?

Il y en avait très peu quand nous avons engagé la réflexion. Aujourd’hui en revanche, nous participons à des études avec le CEREMA ou l’ANEL ( l’Association nationale des élus du littoral) pour anticiper les évolutions du trait de côte face au réchauffement climatique.

Le rechargement du cordon dunaire est un procédé classique. La digue rétro-littorale l’est également. Elle est constituée d’un remblai de matériaux marno-calcaires et terreux avec une surface complètement enherbée. Elle s’élève à7,90m, soit un mètre au-dessus du niveau marin d’occurrence centennale. En revanche, nous allons mettre en œuvre, pour la prochaine reconstruction de deux autres digues une action encore assez rare en France, la dépoldérisation d’une superficie d’environ 17ha. C’est-à-dire que nous rendrons à la mer des terres agricoles autrefois maritimes et asséchées par l’homme. Des portions de ces nouvelles digues vont en effet être reconstruites à l’arrière de l’existant, permettant à la mer de davantage s’étaler en fond de baie, ce qui réduira son niveau.

La réfection du cordon dunaire, la construction de la digue rétro-littorale et la future réfection des digues de la Mollière et de l’Enclos figurent dans notre PAPI (Programme d’actions de prévention des inondations). L’Etat a instauré ce nouveau cadre réglementaire après la tempête Xynthia (2010).

Nous constituons la partie la plus méridionale du PAPI Bresle Somme Authie, qui va du Tréport jusqu’à Berck-sur-Mer. On s’inscrit dans une logique d’ensemble qui fait fi des frontières administratives, après avoir constaté que les actions locales pouvaient avoir des répercussions néfastes quelques kilomètres plus loin.

Notre PAPI actuel a été labellisé en 2016, ce qui le rend éligible aux aides de l’Etat. Il s’achève en 2023 et nous travaillons au prochain.

 

Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?

Il y a eu en effet une étude d’impact comportant entre autres un inventaire de la faune et de la flore. Nous sommes sur des milieux protégés et très riches, la réglementation est très stricte. Des mesures compensatoires ont dû être mises en œuvre : il a fallu recréer un peu plus loin les superficies de zones humides qui ont disparu sur le site du projet. Le projet de la digue rétro-littorale a aussi nécessité l’achat de 8,3 ha de terres, en grande partie agricoles : ce sont des coûts associés et des temps supplémentaires à prévoir.

La digue étant un ouvrage de protection, elle fait l’objet de nombreuses recommandations et contrôles de la DREAL, pour sa construction mais aussi bien sûr pour son entretien.

Globalement, il faut avoir en tête que le temps associé aux études est très important. Et que la moindre modification du projet enclenche des études complémentaires. D’où l’intérêt pour les collectivités d’être épaulées par des experts.

 

Concernant les compétences, quelles sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?

Le cadre réglementaire est complexe. Des connaissances en gestion des risques, en environnement, en hydraulique et géologie marine sont requises. Il me semble également important de bien dimensionner la maîtrise d’œuvre : des chantiers en milieu marin, c’est assez spécifique. Et il faut en même temps conserver un regard critique sur le travail de la maîtrise d’œuvre ! sans oublier de veiller à la maîtrise des coûts : sur ce type de projets, les imprévus chiffrent vite.

 

Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la CA2BM a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?

L’annonce de ce projet a été très bien accueillie par la population. Les inquiétudes étaient fortes et la construction de la digue a beaucoup rassuré. Nous l’avions définie comme une priorité et avions fait le nécessaire auprès de la Préfecture pour mener ce chantier dans des délais resserrés.

Nous avons organisé des réunions publiques à chaque étape et diffusé des documents. Le mot “digue” évoque le béton, certains craignaient que le paysage ne soit défiguré. Nous avons veillé à son intégration paysagère et l’ouvrage s’inscrit dans notre réseau des sentiers de randonnées. On fait coup double en conjuguant protection et valorisation du territoire.

Dans le cadre des mesures compensatoires, nous avons aménagé une zone humide sur un terrain qui est resté propriété de son occupant.

 

Comment la CA2BM a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?

Le projet a un coût global de 2,8 millions d’euros. Dans le PAPI, nous avons établi un prévisionnel de financement pour chaque fiche action, en cherchant des subventions à hauteur de 80% de chaque projet. En l’occurrence, la digue rétro-littorale a été financée à 40% par le fonds dit Barnier (fonds de prévention des risques naturels majeurs) et à 40% par le fonds européen FEDER. Les 20% restants sont à la charge de la CA2BM.

Le coût du projet est important. Mais il faut raisonner en termes de bénéfices/risques. Les enjeux sont humains, écologiques et économiques. D’après notre PAPI, les biens à protéger (immobiliers, entreprises, exploitations agricoles) sont évalués à 24 millions d’euros. On investit donc 2,8 millions d’euros pour protéger 24 millions d’euros de biens.

 

Quels les autres acteurs qui ont accompagné la CA2BM dans la préparation et la réalisation de ce projet ?

Nous avons fait appel à un groupement de maîtrise d’œuvre constituée, pour l’ingénierie, des entreprises Egis et Artelia, du bureau d’études Alfa Environnement pour le volet biodiversité et du bureau Atelier de l’Ile pour la partie paysage. Concernant les travaux, ils ont été réalisés par des sociétés Lefrançois et Guintoli. La partie environnementale a été confiée à la société spécialisée Lebleu. Enfin, l’aménagement de la promenade a été confié à l’entreprise Terideal.

Le projet en détails

Dates clés

2016

Mise à l'agenda du projet

2018

Inspiration

2020

Planification et diagnostic

2021-2022

Réalisation

Chiffres clés

8 000
Nombre d'habitants concernés
1 300 mètres
Longueur de la digue
2 800 000 €
Coût du projet

Résultats

  • une population rassurée

À retenir

La qualité de l'ouvrage et son inscription dans le paysage ont été soulignés par de nombreux interlocuteurs

Les fortes intempéries ont perturbé le déroulé du chantier

L'intervention de démineurs a également retardé le projet

Ressources

En savoir plus sur la communauté d'agglomération CA2BM

Nombre de communes

46

Données de contact

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