Renaturer un cours d’eau dans son lit d’origine et réduire l’érosion (35)
La commune de Saint-Jouan-des-Guérets (35) a souhaité restaurer le ruisseau de la Couaille. Les travaux ont été réalisés par Saint-Malo Agglomération (après transfert des compétences Gemapi), pour un budget de 57 000 €. Cette restauration fait suite à la création d’un bassin d’orage. Celui-ci accumule les eaux issues de la commune et de la 4-voies proche et permet de limiter le débit autour de 5 m3 / s, alors que les orages pouvaient augmenter le débit du cours d’eau jusqu’à 15 m3 / s. Une passerelle à bovins a été ajoutée pour que le bétail ne perturbe pas la biodiversité du ruisseau en le traversant ou en s’y abreuvant.
Entretien avec Yves Chesnais
Ce projet est présenté par :
- Yves Chesnais, 1er adjoint de Saint-Jouan-des-Guérets, en charge des travaux et bâtiments communaux. Ancien président de l’Établissement public territorial de Bassin Rance-Frémur (en charge du dossier lors de la conception du projet)
- Marie-France Ferret, maire de Saint-Jouan-des-Guérets
- Jean-Francis Richeux, 4e vice-président de Saint-Malo Agglomération, en charge de l’environnement, de la transition énergétique, du développement durable, de la Gemapi et de l’accès à la mer et maire de Saint-Père-Marc-en-Poulet
- David Poncet, Responsable du service de la Gestion des Milieux aquatiques et de la Prévention des Inondations (Gemapi).
Yves Chesnais
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Comment la restauration du ruisseau de la Couaille s’est‐elle imposée à l’agenda de votre collectivité ?
Dans les années 80, le ruisseau de la Couaille a été mis en buse et son lit a été dévié. Or, la zone reçoit les eaux pluviales ruisselant de la 4-voies proche et près de 50% des eaux pluviales de la commune. En cas d’orage, le débit pouvait augmenter jusqu’à 15 m3 / s. Nous recevions des plaintes des riverains : en cas d’orage, cela représentait un risque d’érosion et d’inondation des habitations. Des fontis, c’est-à-dire des effondrement du sol, apparaissaient après les orages.
L’équipe municipale du mandat 2014-2020 avait prévu la création d’un bassin d’orage et des travaux autour du ruisseau visant à renforcer les berges pour garantir la circulation de l’eau selon un itinéraire présentant des angles à 90 degrés. La nouvelle municipalité élue en 2020 a poursuivi la réalisation du bassin d’orage mais a privilégié pour le ruisseau un retour au lit d’origine, plus éloigné des habitations.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
J’ai vu d’autres projets dans le cadre de mon mandat à l’EPTB Rance Frémur, par exemple la remise dans son lit d’un linéaire du Linon dans le secteur la Lande Besnard à Saint-Domineuc (35). A l’EPTB nous avions aussi travaillé sur la reconquête de l’ancien lit de la Rance (un fleuve côtier qui se jette en mer à Saint-Malo) en aval du barrage de Rophémel (35), projet qui malheureusement n’a pas pu aboutir.
Est‐ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Nous avons fait réaliser une étude d’impact hydrologique, pour recevoir l’avis de l’agence de l’eau Loire-Bretagne.
Concernant les compétences, quelles sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?
Le projet nécessitait des compétences en hydrogéologie et en propriété foncière, car nous avons déplacé le ruisseau, donc les parcelles qu’il parcourt.
Le cabinet OCEAM nous a aidé à constituer le dossier pour obtenir l’accord de l’agence de l’eau et pour la création du bassin d’orage. Ensuite, c’est le moment où la compétence a été transférée à Saint-Malo Agglomération. C’est donc l’agglomération qui a réalisé les travaux.
Il a aussi fallu respecter la saisonnalité des cultures pour effectuer les travaux au moment qui perturbait le moins l’activité agricole sur les terrains concernés.
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a‐t‐elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
Les travaux sur la Couaille répondaient à une demande des riverains, les habitations étant affectées par les orages. Il a fallu cependant beaucoup de pédagogie pour convaincre que le bassin d’orage allait permettre de diminuer le débit. Une fois le bassin de 5 200 m3 construit, les travaux de restauration du cours d’eau ont été plus faciles à faire accepter.
Le ruisseau est en zone rurale, il est peu visible et les autres habitants de la commune ne se sont pas intéressés à ces travaux. Comme pour tous nos travaux, nous avons annoncé la restauration dans le bulletin municipal.
La Direction départementale des Territoires et de la Mer (DDTM), via sa mission de police de l’eau, nous a aidé à bien appréhender le sujet et à partir sur des bases techniques réalistes.
Comment la collectivité a‐t‐elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?
Saint-Malo-Agglomération, en tant que maitre d’ouvrage (taxe GEMAPI) a réglé la totalité des travaux, soit 57 000 € (comprenant plusieurs parties du cours d’eau et la passerelle à bovins). Des subventions ont été accordées à hauteur de 18 200 € par la Région Bretagne et le Département d’Ille-et-Vilaine.
Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné la collectivité dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
Nous avons reçu l’appui :
- De la DDTM pour le conseil en amont.
- Du cabinet OCEAM pour le montage du dossier (calcul de l’altimétrie, des déports, estimation de la taille de bassin d’orage nécessaire…).
- De l’agence de l’eau pour les autorisations.
Profitez d’une offre de financement des projets en faveur de l’environnement : gestion de l’eau, etc.
Le projet en détails
Dates clés
2016
2020
2020
2022
Chiffres clés
57000
95
1
À retenir
La biodiversité reprend sa place ! On voit des libellules, des grenouilles, des anguilles… Et nous sommes moins inquiets des conséquences de débordements d’eau. Le bassin d’orage permet à la fois d’éviter les débordements (donc l’érosion des terrains d’habitation voisins) et de maintenir un débit pour alimenter le cours d’eau en permanence.
Nous sommes actuellement dans une dynamique de création d’un Parc naturel régional Rance-Côte d’Émeraude, le territoire est fragile et les élus sont intéressés et motivés par les questions environnementales.
Les travaux ont nécessité beaucoup de négociations, à la fois pour convaincre certains de la nécessité de cette restauration (alors que d’autres étaient demandeurs), pour reconquérir les terrains agricoles permettant le retour du ruisseau dans son lit historique et pour obtenir les droits de passage pendant les travaux.
Ressources
Saint Malo Agglo - Enterré pendant plus de 40 ans, un cours d’eau revit à Saint-Jouan-des-Guérets
Mis sous terre dans les années 1980, le ruisseau de La Couaille a retrouvé l’air libre depuis l’automne dernier. Une restauration du cours d’eau et de la zone humide attenante dont les bénéfices sont précieux pour la biodiversité.