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Les cinq compétences « Eau » des élus locaux

Cet article a été rédigé par Camille Giscard d'Estaing

Crédits photos : EPTB Somme AMEVA - En aval du moulin du Soudet, un nouveau lit de rivière a été aménagé, les berges ont été végétalisées

Les compétences locales de l’eau sont au nombre de cinq : la distribution de l’eau potable, l’assainissement des eaux usées, la gestion des eaux pluviales urbaines, la Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMA-PI) et la Défense extérieure contre l’incendie (DECI).

Sécheresses, inondations, pollutions ou incendie l’actualité nous montre que l’eau est une ressource incontournable et précieuse. En France, les élus locaux jouent un rôle majeur dans sa gestion. Autrefois morcelées et assumées à différents échelons, ces compétences font l’objet depuis plusieurs années d’une réforme visant à harmoniser le pilotage local de l’eau. Plusieurs lois, dont MAPTAM (2014), NOTRe (2015), Ferrand Fesneau (2018), Engagement et proximité (2019), ainsi que 3DS (2022) confient progressivement chacune d’entre elles à un seul et même interlocuteur : les intercommunalités (communautés de communes, d’agglomération, urbaines et métropoles).

Ces nouvelles dispositions permettent non seulement une mutualisation des moyens à l’échelle des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) mais aussi de renforcer la cohérence transversale en matière de politiques d’aménagement du territoire et de gestion de l’eau. Voici un panorama simplifié des compétences « eau »

Panorama simplifié des compétences « eau » des élus locaux

La distribution d’eau potable

Avec une consommation moyenne de 150 litres d’eau par jour et par habitant, l’eau destinée à la consommation humaine est un enjeu majeur de santé publique pour les élus locaux. Sa distribution est à la charge de l’intercommunalité. Elle doit donc fixer un schéma de distribution déterminant les zones pour lesquelles elle est soumise à une obligation de desserte. S’ajoutera à ce schéma un inventaire, un plan et un descriptif détaillé des ouvrages de transport et de distribution. En revanche, les missions en amont de production, de transport et de stockage de l’eau potable restent facultatives et peuvent donc être assurées par d’autres collectivités ou associations syndicales. Pour des questions de transparence, les maires ou présidents d’EPCI sont tenus de remettre annuellement, un rapport sur le prix et la qualité du service public (RPQS) pour l’année écoulée.
Enfin, les services d’eau potable fonctionnent sur leur budget propre et en circuit fermé grâce à des redevances perçues directement auprès de l’usager. C’est le principe dit « l’eau paye l’eau », qui s’applique également à l’assainissement des eaux usées (voir ci-dessous).

L’assainissement des eaux usées

380 000 kilomètres, c’est la longueur cumulée des réseaux d’assainissement en France, qui relèvent de la compétence assainissement obligatoire des intercommunalités. Il existe deux types d’assainissement, le collectif et le non-collectif. Au regard de la densité de population, il peut être financièrement plus intéressant pour une collectivité d’opter pour un système d’assainissement non-collectif ou individuel (par exemple, des fosses septiques). Quel que soit le cas de figure, la collectivité compétente doit en premier lieu définir un zonage d’assainissement délimitant les zones d’assainissement collectif et non-collectif ainsi qu’un zonage pluvial.

En cas d’assainissement collectif, il s’agira ensuite de définir un schéma d’assainissement collectif, comprenant un descriptif détaillé des ouvrages de collecte et de transport des eaux usées, et enfin, d’assurer le contrôle des raccordements au réseau public, mais aussi la collecte, le transport et l’épuration des eaux usées, ainsi que l’élimination des boues produites.

Dans le cas d’assainissement non-collectif, il lui faudra assurer le contrôle des installations autonomes neuves ou à réhabiliter, veiller à leur bon fonctionnement ainsi qu’à l’entretien des installations existantes.

La gestion des eaux pluviales urbaines

Intimement liées aux compétences assainissement et GEMA-PI, les eaux pluviales urbaines constituent une sérieuse menace pour la qualité des eaux et des écosystèmes aquatiques, mais aussi un risque supplémentaire d’inondation lors d’épisodes pluvieux sévères. De par leur nature très localisées, le bloc communal est le seul à pouvoir en assumer la gestion : collecte, transport, stockage et traitement des eaux pluviales des aires urbaines, y compris en zone rurale.

Cependant, l’exercice de cette compétence est différencié en fonction de la nature de l’EPCI. Trois scénarios possibles : pour les grosses intercommunalités (métropoles et communautés urbaines) la compétence est obligatoire et rattachée à l’assainissement. Toujours obligatoire pour les communautés d’agglomérations, elle est distincte de cette dernière. Enfin, la gestion des eaux pluviales urbaines est facultative pour les communautés de communes, libre d’apprécier la pertinence d’une gestion intercommunale, en fonction du contexte territorial.  Côté financement, en sa qualité de service public administratif, la gestion des eaux pluviales est portée par le budget général de la commune ou de l’EPCI.

La gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMA-PI)

La prévention des inondations pouvant être directement impactée par la gestion amont des milieux aquatiques, la GEMAPI réunit en une seule compétence ces deux missions. Le volet « PI » de la GEMA-PI est plus particulièrement constitué par des actions obligatoires d’aménagement de bassins versants, et bien sûr, de défense contre les inondations et contre la mer. Le volet, « GEMA », quant à lui, comprend la protection et la restauration des écosystèmes aquatiques et des zones humides ainsi que l’entretien et l’aménagement des cours d’eau, canaux, lacs et plans d’eau. Les milieux aquatiques ne respectant aucune frontière administrative, les intercommunalités peuvent transférer ou déléguer l’ensemble de la compétence à des syndicats mixtes (de type EPAGE ou EPTB) structurés à l’échelle du bassin versant ou du sous-bassin versant.
La création, l’entretien et la réhabilitation des ouvrages de protection (comme les digues par exemple) pouvant être particulièrement coûteux, les EPCI ont la possibilité de mettre en place une taxe spéciale dite « GEMA-PI » pour la financer.

La défense extérieure contre l’incendie (DECI)

La cinquième et dernière compétence locale de l’eau est celle de la défense extérieure contre les incendies. Celle-ci est à la fois une compétence et un pouvoir de police spéciale relevant, contrairement aux quatre autres, des responsabilités du maire. Elle a pour objet de s’assurer de l’existence et de la suffisance des ressources en eau ainsi que la disponibilité des points d’eau pour la lutte contre l’incendie par rapport aux risques à défendre sur le territoire. Il revient donc au maire de créer un service public responsable de sa gestion matérielle, notamment de la création, maintenance, entretien, signalisation, remplacement, contrôles techniques des Points d’Eau Incendie (PEI). Une bonne collaboration entre la commune, les services d’incendie et de secours, et les services d’eau potable est donc nécessaire. Cependant, toutes les dépenses liées à cet exercice doivent être clairement distinguées des services publics d’eau potable et être inclus dans le budget communal.
Aucun transfert n’est pas prévu par la loi NOTRe, cependant une commune peut volontairement décider de transférer sa compétence à l’intercommunalité qui l’exercera au titre de ses compétences facultatives.

Conclusion

Les compétences locales liées à l’eau sont donc multiples et complémentaires. La mise en œuvre de certaines d’entre elles dépend cependant de la taille des EPCI. Malgré la complexité du cadre juridique et politique, il est essentiel de comprendre les rouages de ce bloc de compétences étant donné son impact direct sur l’environnement, les hommes et les activités économiques.
Il est important de rappeler que cette nouvelle gouvernance, fondée sur un système communautaire, est très récente. Le transfert remonte respectivement à 2015 pour la GEMA-PI et 2020 pour les compétences eau, assainissement et eaux pluviales (s’étalant jusqu’en 2026 dans certains cas). Les retours d’expériences révèlent d’ores et déjà d’important défis, tels que la reconquête de la qualité des eaux, l’émergence de nouveaux polluants, la gestion patrimoniale des réseaux ou encore l’entretien des ouvrages de protection contre les inondations. Tout cela sans compter les besoins futurs. Le sujet nécessite en cela un pilotage fin, liant stratégie et infrastructures.
De nombreuses solutions de financement et dispositifs de soutien existent pour aider les EPCI à réunir les investissements nécessaires.

Cet article vous est proposé par aquagir

aquagir est un collectif d’acteurs œuvrant dans l’accompagnement de bout-en-bout des projets de gestion des eaux dans les territoires avec une vision globale, collective et écosystémique des enjeux et des solutions.  aquagir regroupe l’ANEB, la Banque des Territoires, le BRGM, le Cercle Français de l’eau, France Water Team et l’UIE (Union des Industries et Entreprises de l’Eau)

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