Tout d'abord, l'hydrométrie permet la prévision des crues via des réseaux comme Vigicrues, qui surveille en temps réel hauteurs et débits grâce à des stations hydrométriques (près de 3 000 en France)69. Elle alimente les modèles de prévision utilisés par les services de prévision des crues (SPC) pour émettre des alertes.
De plus, les données hydrométriques guident la construction d'infrastructures (barrages, ponts) et optimisent la production hydroélectrique en évaluant les débits disponibles. Elles servent aussi à dimensionner les systèmes d'irrigation et d'adduction d'eau.
L'hydrométrie contribue à la gestion durable des eaux en quantifiant les prélèvements autorisés (police de l'eau) et en étudiant l'impact des activités humaines sur les écosystèmes aquatiques. Elle aide également à anticiper les sécheresses en analysant les tendances des débits.
Aussi, les mesures hydrométriques long terme (15+ ans) fournissent des données essentielles pour comprendre les cycles hydrologiques, calibrer les modèles climatiques et étudier l'érosion ou les dépôts sédimentaires.
Bien que l'hygrométrie (humidité de l'air) soit distincte, l'hydrométrie influence indirectement l'agriculture via la gestion des réserves d'eau pour l'irrigation et la prévention des inondations dommageables aux cultures. Les données de débit aident à planifier les prélèvements en période de stress hydrique.
Une station hydrométrique mesure principalement la hauteur d'eau à l'aide d'une échelle limnimétrique graduée, souvent complétée par des capteurs (radar, ultrasons) qui enregistrent en continu les variations de niveau.
Ces données sont converties en débit grâce à une courbe de tarage, relation mathématique établie par des jaugeages ponctuels mesurant simultanément hauteur et vitesse de l'eau. Certaines stations intègrent directement des débitmètres à ultrasons pour calculer le débit en temps réel, notamment dans les canaux régulés.
Les données sont transmises via des systèmes automatisés (GPRS, 4G) à des centres de surveillance pour la prévision des crues et la gestion hydrologique. La stabilité des mesures dépend de la révision régulière des courbes de tarage, souvent affectées par l'érosion ou les aménagements humains. Les stations modernes comme RIVIA combinent autonomie énergétique (panneaux solaires) et connectivité pour un suivi en temps réel.
Les défis de l'hydrométrie se structurent autour de complexités techniques, environnementales et opérationnelles :
Les changements de lit fluvial (érosion, sédimentation) modifient constamment les courbes de tarage, nécessitant des jaugeages fréquents pour maintenir leur précision, surtout en basses eaux où de faibles variations de hauteur impactent significativement le débit calculé. La végétation aquatique perturbe les mesures en augmentant la rugosité et en réduisant la section d'écoulement.
L'hydrométrie présente aussi des limites technologiques, les capteurs (ultrasons, radars) subissent des dérives métrologiques et des dysfonctionnements liés à des facteurs externes : températures extrêmes, embâcles, ou panne d'alimentation (panneaux solaires défaillants). Les méthodes innovantes comme la LSPIV (mesure de vitesse par vidéo) échouent en cas de mauvaise visibilité (nuit, brouillard).
L'hydrométrie exige une critique rigoureuse des mesures pour identifier les anomalies (décalages de capteurs, données aberrantes) et combler les lacunes via des modèles hydrologiques. La consolidation des données prend 18 à 24 mois, avec des risques d'écarts majeurs entre données brutes et validées (jusqu'au double pour les crues extrêmes).
Un autre défi concerne les incertitudes métrologiques. Même sur les stations les mieux calibrées, les débits courants présentent une incertitude de 5 %, qui s'aggrave en conditions extrêmes (hautes ou basses eaux) où les courbes de tarage sont moins fiables. Les paramétrages initiaux(bathymétrie, profil hydraulique) peuvent devenir obsolètes avec l'évolution du lit.
Ces défis exigent une combinaison d'expertise technique, de suivi continu et d'innovations méthodologiques pour garantir la fiabilité des données hydrologiques à long terme.
La prévision des crues s'appuie sur trois piliers :
1. Les données hydrométriques en temps réel
Les stations hydrométriques mesurent en continu la hauteur d'eau et le débit des cours d'eau via des capteurs (ultrasons, radars) et des courbes de tarage. Ces données alimentent des modèles numériques comme GRP ou MASCARET pour simuler l'évolution des crues.
2. Les données pluviométriques historiques et prévisionnelles
Les précipitations passées (mesurées par pluviomètres) et futures (issues de modèles météorologiques comme ARPEGE) permettent d'anticiper les apports en eau dans les bassins versants. Ces informations sont cruciales pour les modèles hydrologiques comme ATHYS, qui transforment les pluies en débits.
3. La modélisation couplée hydrologie-hydraulique
Les modèles hydrologiques (ex. SOPHIE) simulent la réponse des bassins aux pluies, tandis que les modèles hydrauliques (ex. TELEMAC 2D) prédisent la propagation des crues dans les lits fluviaux. Le SCHAPI intègre ces outils dans la plateforme Vigicrues, combinant observations et prévisions pour générer des alertes.